Son fils, Mohamed ben Salman, avait déclaré qu’Israël avait le droit de vivre en paix sur son territoire.
Quand le fils se perd, le père vient à la rescousse. Après que le prince héritier saoudien, Mohamed ben Salman (« MBS »), a déclaré, hier, dans les colonnes de la revue américaine The Atlantic, qu’Israël avait droit de vivre en paix sur son territoire, son monarque de père, le roi Salman, a rectifié le tir aujourd’hui. Oui, l’Arabie saoudite est toujours favorable à la création d’un Etat palestinien, a déclaré le dirigeant saoudien, nuançant les propos de son fils, qui a également affirmé ne voir « aucune objection » religieuse à l’existence de l’Etat hébreu.
Alors que des tensions resurgissent entre Israéliens et Palestiniens – après que les premiers ont réprimé dans le sang une manifestation, vendredi dernier, faisant près de 20 morts chez les seconds -, la sortie médiatique du nouvel homme fort d’Arabie saoudite était, au mieux, maladroite, au pire, extrêmement inconsciente. Car MBS – dont l’interview avait certes eu lieu avant les événements de la semaine dernière – s’est aussi rangé derrière la position des Etats-Unis et d’Israël concernant Jérusalem, appelant de facto les Palestiniens à renoncer à faire de Jérusalem-Est leur capitale.
Question iranienne
Si la déclaration du prince héritier a pu échauder passablement ces derniers, sa véritable cible était pourtant bel et bien l’Iran, bête noire des Saoudiens au Moyen-Orient et ennemi juré d’Israël. MBS multiplie d’ailleurs, depuis le début de sa tournée américaine, les sorties anti-République islamique. Tout sauf un hasard. Car depuis qu’il est à la Maison Blanche, Donald Trump a pris le contre-pied parfait de la diplomatie de Barack Obama, en se rapprochant de Riyad ainsi que de Tel-Aviv, et en replaçant Téhéran sur l’ « axe du mal » érigé par George W. Bush.
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Washington, depuis, milite pour un resserrement des relations entre Américains, Saoudiens et Israéliens pour contrer la volonté suprémaciste des Iraniens dans la région. C’est de cette manière qu’il faut lire, selon eux, la présence de l’armée iranienne en Syrie – qui a aidé Bachar al-Assad à reprendre les rênes du pays -, l’appui apporté par Téhéran aux rebelles houthistes, au Yémen, et le poids du parti politique du Hezbollah au Liban. Et bien qu’ils n’aient officiellement aucune relation diplomatique, Saoudiens et Israéliens s’entendent absolument sur la question iranienne.
« Médiateur légitime »
Le Premier ministre de l’Etat hébreu, Benyamin Netanyahou, qualifie d’ailleurs régulièrement le royaume saoudien d’allié indispensable des pays arabes opposés à Téhéran . A l’opposé, lorsqu’il ne milite pas pour la reconnaissance de Jérusalem comme capitale israélienne, MBS évoque le Guide suprême iranien comme une personne « pire qu’Adolf Hitler », mue par la volonté de conquérir non l’Europe mais le monde. Ou appelle la communauté internationale à exercer davantage de pression sur la République islamique, concernant notamment ses capacités nucléaires.
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A travers sa déclaration dans The Atlantic, MBS espérait faciliter davantage le rapprochement entre Israël et Arabie saoudite, dont le conflit israélo-palestinien a toujours été un obstacle. Le roi Salman, d’ailleurs, n’a pas manqué de souligner la nécessité de relancer le processus de paix au Proche-Orient, tandis que les Etats-Unis doivent prochainement présenter leur plan pour résoudre la crise entre Israël et Palestine. Pour mémoire, en décembre dernier, les Palestiniens ont affirmé qu’ils ne considéraient plus Washington comme un « médiateur légitime » dans ce conflit.

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