En 2018, un vent de liberté soufflera sur les femmes saoudiennes

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04.01.2018

Entre le droit de conduire et celui de se rendre au stade, les Saoudiennes devraient voir leur condition légèrement s’améliorer.

L’Arabie saoudite a annoncé, mardi 12 décembre dernier, qu’elle permettrait aux femmes de conduire, mettant fin à une politique de longue date devenue l’un des symboles mondiaux de l’oppression des femmes dans ce royaume ultra-conservateur. Le changement, opérationnel dès juin 2018, a été annoncé par un décret royal à la télévision saoudienne, retransmis simultanément à Washington, qui a essentiellement mis l’accent sur les dommages que l’interdiction de conduire faite aux femmes a causé à l’image du royaume dans le monde.

Le plan « Vision 2030 »

Ainsi, l’Arabie saoudite commencera cette année à émettre des permis de conduire aux femmes, non seulement pour les voitures, mais aussi pour les motocyclettes et les camions. Une avancée sociale indiscutable mais non désintéressée. Les dirigeants saoudiens espèrent que la nouvelle politique boostera l’économie du royaume grâce à l’augmentation du nombre de femmes sur les lieux de travail. Beaucoup des Saoudiennes qui travaillent dépensent une grande partie de leurs salaires pour payer des chauffeurs afin de les conduire sur leurs lieux professionnels.

Le droit accordé aux femmes de conduire est d’ailleurs compris dans le vaste plan économique « Vision 2030 » – pensé pour tirer le royaume de sa dépendance au pétrole. Le prince héritier, Mohamed ben Salman (dit « MBS »), porteur de cette réforme économico-sociale, espère ainsi que la vente de véhicules augmentera incidemment, tout comme le taux de participation des femmes dans les effectifs professionnels, de 22 à 30 %, d’ici 2030. Ce qui est loin d’être anecdotique, dans un pays aux mœurs conservatrices. Mais qui s’ouvre de plus en plus.

Au stade pour la première fois

En 2018, les femmes seront également autorisées à assister à des rencontres sportives dans les stades nationaux, lieux auxquels elles n’avaient pas accès jusque-là. Il y aura ainsi des « sections familiales », communes à la plupart des espaces publics dans le royaume, séparées des sections masculines. Une mesure qui, selon le gouvernement, assurera leur confort et facilitera leur participation aux manifestations sportives nationales.

Trois complexes traditionnellement réservés aux hommes seront désormais ouverts aux femmes et aux familles à Jeddah, Dammam et la capitale, Riyad, en 2018, a déclaré président du conseil d’administration de l’Autorité générale du sport, Turki ben Abdul Mohsen al-Sheikh. En 2017, MBS avait testé la réaction – positive – du public à cette décision, en levant l’interdiction d’accès aux femmes et aux familles au stade principal de Riyad, à l’occasion de la fête nationale. Des centaines de femmes, aux couleurs nationales, s’étaient alors rendues au stade pour la première fois.

« Enjeu des droits des femmes »

Une première également en 2018 : l’Arabie saoudite accueillera cet été une ambassadrice étrangère, en la personne de Dominique Mineur, actuellement représentante de la Belgique aux Emirats arabes unis (EAU). Bien que la nomination de Mme Mineur n’ait pas encore été confirmée par la diplomatie saoudienne, le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, a déclaré que la désignation d’émissaires féminins dans des endroits comme Riyad « aurait dû être évidente ».

« C’est une preuve supplémentaire de l’enjeu des droits des femmes dans ces pays, mais surtout de notre volonté d’envoyer les personnes les plus compétentes à des postes de plus en plus importants sur la scène internationale », a-t-il déclaré depuis Bruxelles. Un exemple de plus de la libéralisation des mœurs en Arabie saoudite, qui devrait faire les affaires du futur monarque, Mohamed ben Salman, qui souhaite, à 32 ans, clairement tirer un trait sur le passé rigoriste et sclérosé de son pays.

Développement du secteur culturel

Outre la condition féminine qui s’améliore en Arabie saoudite, MBS entend pratiquer une politique sociétale plus souple à différents niveaux. En décembre dernier, le royaume a par exemple annoncé qu’il autorisait la réouverture des salles de cinéma, ce qui a ravi les fans du septième art, les réalisateurs et les chaînes de cinéma. A la clé, là aussi : des intérêts économiques certains, les Saoudiens se rendant aujourd’hui dans les pays voisins pour visionner des films.

« L’ouverture des salles servira de catalyseur à la croissance économique et à la diversification », a effectivement déclaré le ministre saoudien de la Culture et de l’information, Awwad ben Saleh al-Awwad. « En développant le secteur culturel, nous créerons de nouvelles opportunités d’emploi et de formation, tout en enrichissant les options de divertissement du royaume. » Reste à savoir jusqu’à quel point le prince héritier souhaite booster cette économie du divertissement. Mais en 2018, en Arabie saoudite, les femmes devraient se rendre au cinéma en voiture. Chose impensable il y a quelque temps.

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