Le Sahara occidental a besoin de « négociations sous l’égide de l’ONU »

Le territoire, « non autonome » selon l’ONU, fait face à un regain des provocations entre Sahraouis et Marocains.

Le Sahara occidental entame 2018 comme il a terminé 2017 : dans la confusion la plus totale. Le 25 décembre dernier, sur ce territoire du nord-ouest de l’Afrique, « non autonome » d’après les Nations unies (ONU), l’armée sahraouie effectuait des manœuvres militaires tout en prévenant qu’elle était « prête à faire face […] pour arracher le droit du peuple sahraoui à l’indépendance » et ne pouvait « être confinée éternellement dans un statut de réfugié » selon le « ministre de la Défense » de la République arabe sahraouie démocratique, Abdullahi Lehbib. Ce à quoi le porte-parole du gouvernement marocain, Mustapha Khalfi, avait répondu que ces intimidations traduisaient en réalité une perte de puissance sur l’échiquier international des « autorités » sahraouies.

Mission de maintien de la paix

« Les provocations du Front Polisario [mouvement sahraoui dont l’objectif est l’indépendance totale du Sahara occidental, ndlr] illustrent son déclin et sa désintégration » selon lui. Une partie de la presse marocaine, de son côté, a estimé que l’évocation d’une guerre par l’armée sahraouie est un « projet suicidaire » pour le Polisario, qui continue d’après elle de se fissurer à cause de mouvements dissidents en son sein. Pas de quoi freiner les principaux intéressés : certains hommes appartenant au mouvement sahraoui, munis d’armes, étaient présents, hier, dans la zone démilitarisée de Guergarat, dans le sud-ouest du territoire, où le Front avait installé un poste de contrôle l’an dernier.

« Des regains de tension, il y en a régulièrement » affirme Khadija Mohsen-Finan, chercheuse et professeurs de sciences politiques, à RFI. « Je crois que tout protagoniste voudrait sortir de l’immobilisme actuel. Il y a effectivement des provocations de part et d’autre un peu pour attirer l’attention de la communauté internationale. » En avril dernier, l’ONU avait exprimé son espoir de voir les négociations relancées après que le Front Polisario s’était retiré d’une zone tampon de la région. Les quinze membres du Conseil de sécurité avaient alors adopté à l’unanimité une résolution de soutien à une reprise des pourparlers, prolongeant également jusqu’au 30 avril prochain le mandat de la Mission de maintien de la paix de l’ONU sur place (Minurso).

Rivalité entre Maroc et Algérie

Cette dernière, chargée de superviser le respect du cessez-le-feu de 1991 entre le Maroc et le Front, s’était d’ailleurs prononcée contre l’installation du poste de contrôle sahraoui. Et voit aujourd’hui son travail perturbé par la reprise des tensions. « Derrières cette gesticulation et ces bruits de bottes, il y a une volonté pour chacun des protagonistes de sortir du conflit » estime Mme Mohsen-Finan. Seulement, « on est une fois de plus devant […] une démonstration de force, c’est-à-dire que le Front Polisario menace de reprendre les armes. » Cette région pourrait-elle se changer en Sahara accidenté ? « Je crois qu’on ne veut pas prendre cette position au sérieux. On tourne en rond [alors] qu’on aurait besoin, aujourd’hui, de négociations franches sous l’égide de l’ONU. »

Le Sahara occidental n’a effectivement toujours pas trouvé de statut juridique définitif depuis le départ des colons espagnols en 1976. Ceci malgré les tentatives incessantes du Front Polisario, qui avait créé la même année la République arabe sahraouie démocratique. Revendiquée également par le Maroc, cette bande de terre de 266 000 kilomètres carrés, qui regorge de ressources minérales encore inexploitées, est devenu l’une des vitrines de la rivalité entre Marocains et Algériens dans la région, ces derniers soutenant l’effort sahraoui.

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