Face au réchauffement de la planète, il faut une véritable diplomatie du climat

Dans son dernier rapport, le GIEC, une fois de plus, dresse un bilan alarmant de l’état de la lutte contre le réchauffement climatique.

La capacité d’écoute des dirigeants de la planète est une chose étrange. Étrange et dangereuse. Sur certains sujets – l’accord nucléaire iranien, la guerre en Ukraine -, les chefs d’États sont tout ouïe, et disposés à agir, coûte que coûte, pour la résolution de l’équation. Sur d’autres, en revanche, leurs oreilles se ferment, leurs yeux se voilent, et ils n’entendent ni ne voient les cris et signaux d’alarme répétés. Comme au Yémen, où l’intervention saoudienne « célèbre » ses sept années, ce mois-ci, dans l’indifférence toujours plus problématique de la communauté internationale. Comme sur le sujet du climat, également.

Depuis des années, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) a beau le dire : attention, l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES) risque de poser problème, non seulement pour le climat, mais, à terme, pour l’habitabilité de la planète, tout simplement – le devenir de la vie, humaine, animale, végétale. Mais non, rien n’y fait. Fin février, les experts des Nations unies (ONU) ont donc publié un nouveau rapport, ont donc poussé un nouveau cri d’alarme, pour mettre en lumière la « menace pour le bien-être humain et la santé de la planète » que notre irresponsabilité fait courir.

« Ce rapport est un terrible avertissement sur les conséquences de l’inaction », a affirmé, à ce titre, l’économiste sud-coréen Hoesung Lee, président du GIEC. Et selon le groupe onusien, le pire est à venir. Si bien que limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle – le plan originel – ne suffira plus ; « le monde s’expose à de multiples aléas climatiques inévitables dans les deux décennies à venir », estiment les scientifiques. Des phénomènes météorologiques qui n’ont rien d’inédit, puisqu’ils ont déjà lieu. Seule différence : leur intensité. Selon le GIEC, nous devons nous attendre, dans les prochaines années, à davantage de pénuries alimentaires, de pauvreté, de famines, voire de conflits.

« Perdre du temps, c’est périr »

Près de la moitié de l’humanité, d’ores et déjà, vit dans une zone rouge, et « de nombreux écosystèmes ont atteint le point de non-retour », a fait savoir Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, pour qui le nouveau rapport du GIEC est « un recueil de la souffrance humaine », la preuve que les dirigeants de la planète ont échoué dans la lutte contre le réchauffement climatique. Ce qu’il faut faire, selon lui ? Retrouver un « leadership », tout d’abord. Une posture responsable qui puisse permettre de sanctionner les principaux « coupables [qui] sont les plus grands pollueurs du monde ».

Exit, dans un second temps, les énergies fossiles, qui « étouffent l’humanité » d’après M. Guterres. Tout ce charbon, ce pétrole et ce gaz – au centre des enjeux géopolitiques, que ce soit dans le Golfe ou en Ukraine -, tous ces combustibles qui sont autant d’impasse pour la planète, les économies, et l’humanité, a ajouté le diplomate portugais. S’il est évident que nous ne pourrons pas couper les robinets d’hydrocarbures du jour au lendemain, le seul fait que nous n’essayions pas de nous affranchir – ou alors modérément – de cette dépendance aux fossiles est alarmant.

Comme l’a rappelé Antonio Guterres, en matière de lutte contre le réchauffement climatique, « perdre du temps, c’est périr ». Louvoyer, pourrait-on ajouter, c’est regarder mourir les autres avant soi. Les autres qui, comme au Yémen, connaissent déjà de plein fouet les conséquences (humanitaires, nutritionnelles, sanitaires) de ces infimes degrés supplémentaires. Dans le cadre du conflit yéménite, il se trouve que Riyad est à la croisée des chemins : va-t-en-guerre et pollueur, le royaume saoudien possède toutes les cartes en main pour arranger la (les) situation(s). A condition d’entretenir un dialogue avec lui, et non pas une opposition de principe. Peut-être est-il temps d’ériger une véritable diplomatie internationale du climat ?

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