Sans un soutien de la communauté internationale, les cas de violences sexuelles et d’atteintes aux droits humains se répèteront.
La violence, omniprésente au Soudan du Sud, ainsi que les violations récurrentes des droits humains, ne cesseront pas sans une véritable lutte contre l’impunité. Voici ce qu’a estimé une commission d’enquête des Nations unies, lundi, dans un nouveau rapport qui souligne, notamment, comment les auteurs des crimes les plus graves (dont les attaques généralisées contre les civils et les exécutions extrajudiciaires) restent impunis.
Le 7 mars dernier, le Conseil des droits de l’Homme publiait un rapport préliminaire de 20 pages, dont la Commission reprend en les détaillant les principales conclusions sur le Soudan du Sud. Verdict : sur l’année 2022, les attaques généralisées contre les civils, y compris les meurtres, les viols, les cas d’esclavage sexuel et d’autres formes de violence sexuelle, ont été légion. Sans compter les déplacements massifs de Soudanais du Sud, et ce dans de nombreux États.
Le gouvernement sud-soudanais a bien annoncé la création de commissions d’enquête spéciales pour endiguer la situation, mais aucune d’entre elles n’a abouti à une obligation de rendre des comptes. Et les enquêteurs de l’ONU, relevant que « les membres du gouvernement et de l’armée impliqués dans ces crimes graves sont toujours en poste », de s’alarmer de la situation au Soudan du Sud.
« Depuis plusieurs années, nos conclusions montrent que l’impunité pour les crimes graves est l’un des principaux moteurs de la violence et de la misère auxquelles sont confrontés les civils au Sud-Soudan, a déclaré dans un communiqué la Présidente de la Commission, Yasmin Sooka. Nous avons donc pris la décision de nommer un plus grand nombre d’individus qui méritent une enquête criminelle et des poursuites pour leur rôle dans les violations flagrantes des droits de l’homme », a-t-elle ajouté.
Soutien de la communauté internationale
Le gouverneur de l’État d’Unity, Joseph Monytuil, ainsi que le lieutenant-général des forces de défense du peuple du Sud-Soudan, Thoi Chany Reat, sont particulièrement visés par le rapport de l’ONU, et justifient selon l’organisation une enquête criminelle en rapport avec les exécutions extrajudiciaires effectuées par l’État et perpétrées à Mayom en août 2022. Le commissaire du comté de Koch, Gordon Koang, fait quant à lui partie des personnes responsables des attaques généralisées contre les civils à Leer, en février et en avril 2022.
D’autres personnes, selon les conclusions de la commission d’enquête, mériteraient un examen ou une enquête plus poussée concernant les violations des droits humains. Notamment dans l’État de Warrap, l’État du Haut-Nil, les parties septentrionales de l’État de Jonglei et les États d’Equatoria. Mais encore faut-il que les autorités du pays « s’engagent à nouveau et adhèrent aux valeurs et aux promesses de l’accord de paix », selon l’un des trois membres de la commission, Barney Afako.
« Nous appelons les autorités à mener des enquêtes appropriées sur les auteurs présumés de crimes graves, quel que soit leur rang ou leur fonction, et à mettre en place et à renforcer les mécanismes judiciaires permettant de les tenir pour responsables », a de son côté conclu Andrew Clapham, également membre de la Commission. Mais sans un soutien inconditionnel de la communauté internationale, beaucoup craignent que le rapport ne reste lettre morte.
Pour l’heure, malgré les appels au cessez-le-feu et à la mise en œuvre de l’accord de paix, les conflits et affrontements, à travers le pays, s’accompagnent toujours de violations des droits humains, entre autres abus à l’encontre de la population. En 2022, 380 femmes et filles ont été déclarées victimes de violences sexuelles liées au conflit. Entre août et décembre, au moins 100 autres femmes et filles ont été enlevées par les parties au conflit lors d’affrontements. Il serait temps, peut-être, que la communauté internationale s’intéresse pour de bon au Soudan du Sud.
Crédits photo : EU/ECHO/ Bertha Wangari (Flickr).