Selon certaines estimations, Beyrouth aurait besoin de 80 milliards de dollars pour se sortir de la crise économique.
Le Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) a affirmé, lundi, qu’il soutenait les efforts du Liban pour mettre fin à la crise économique et relever d’autres défis, comme l’impact du Covid-19. L’institution a appelé la communauté internationale à venir en aide au Pays du Cèdre. Car il y a « un besoin urgent pour les autorités du pays à répondre aux aspirations du peuple libanais en mettant en place des réformes économiques efficaces ».
En mars dernier, le Liban, l’une des nations les plus endettées au monde, a fait défaut sur sa dette (92 milliards de dollars, soit 170 % du PIB) pour la première fois de son histoire – c’est-à-dire que Beyrouth ne peut respecter auprès de ses prêteurs les échéances de remboursement de sa dette. Dans le même temps, les manifestations antigouvernementales qui ont éclaté en octobre se sont atténuées, alors que le pays connait depuis la mi-mars un blocage national pour freiner la propagation du coronavirus. Ces restrictions commencent à s’assouplir.
Jeudi dernier, le Premier ministre libanais, Hassan Diab, a annoncé qu’il demanderait au Fonds monétaire international (FMI) un programme pour venir en aide à son pays. Après quoi des manifestants se sont regroupés, vendredi, pour critiquer la gestion gouvernementale de cette crise inédite, qui a vu la livre libanaise s’effondrer – alors qu’1 dollar américain s’échangeait contre environ 1 500 livres libanaises avant la crise, il s’échange aujourd’hui contre 4 400 livres libanaises, affirmait L’Orient-Le Jour fin avril – et les prix et l’inflation grimper.
Depuis une dizaine de jours, le pays connait un regain de tensions, tandis que les manifestants ont relancé leur mobilisation pour dénoncer, en plein mois du ramadan, la crise économique et l’action du gouvernement. « Après une relative accalmie due à l’apparition de la pandémie Covid-19, les protestations contre la crise économique qui s’aggrave rapidement dans le pays ont repris », annonçait début mai Ruper Colville, porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme (HCDH).
« Nous sommes profondément préoccupés par le regain de violence qui a éclaté au Liban cette semaine, causant la mort d’un manifestant et blessant des dizaines d’autres civils et des forces de l’ordre, ainsi que d’importants dégâts de biens publics et privés », a-t-il également déclaré, alors que certains observateurs prédisent que les manifestations vont se multiplier dans certaines villes libanaises.
Dans un rapport au Conseil de sécurité diffusé lundi, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a bien évidemment abordé la crise économique et la pandémie de Covid-19 qui touchent le Liban. « Comme la situation économique et financière désastreuse du Liban est maintenant aggravée par l’impact négatif du Covid-19 sur l’économie du pays, il est d’autant plus urgent que les dirigeants du pays élaborent et mettent en œuvre les réformes nécessaires », a-t-il déclaré.
M. Guterres a également souligné que ces mesures devaient être prises « en parallèle de la fourniture d’une aide financière et alimentaire aux groupes de population les plus vulnérables, dont le nombre augmente rapidement et qui sont confrontés à une pauvreté extrême. » D’après lui, le gouvernement poursuit effectivement ses efforts pour étendre l’autorité de l’Etat à l’ensemble du pays, quand bien même certaines milices libanaises et non libanaises continuent d’opérer en dehors du contrôle gouvernemental, en violation de la résolution de 2004 et des accords de Taëf (1989) qui ont mis fin à la guerre civile dans le pays (1975-1990).
En début de semaine, la cheffe du FMI, Kristalina Georgieva, a précisé que le Liban avait réalisé « un pas en avant important » pour faire face à ses défis économiques, en adoptant jeudi dernier un plan de relance. Selon certaines estimations, Beyrouth aurait besoin de 80 milliards de dollars pour se sortir de la crise. Mme Georgieva a indiqué sur son compte Twitter avoir eu un entretien productif avec le Premier ministre libanais, et que le FMI allait discuter très rapidement avec les autorités libanaises pour tenter de sortir le Pays du Cèdre de la crise. Les banques du Liban, quant à elles, ont d’ores et déjà indiqué qu’elles rejetaient le plan de relance du gouvernement.
Crédits photo : un soldat libanais lance une bombe lacrymogène sur des manifestants anti-gouvernement dans le nord de Tripoli, au Liban, mardi 28 avril 2020. AP Photo/Bilal Hussein
