Israël : non-renouvellement de la loi refusant la citoyenneté israélienne aux conjoints arabes

Adopté en 2003 en pleine « intifada », le texte avait été renouvelé chaque année.

Le Parlement israélien a échoué, tôt ce mardi, à renouveler une loi qui interdit aux citoyens arabes d’étendre la nationalité ou les droits de résidence à leurs conjoints de la Cisjordanie et de Gaza occupés, lors d’un vote serré qui a soulevé des doutes quant à la viabilité du nouveau gouvernement de coalition du pays. Le vote, qui a eu lieu après une session de nuit de la Knesset, a marqué un revers majeur pour le Premier ministre, Naftali Bennett.

Le nouveau dirigeant israélien, qui espérait trouver un compromis entre son parti Yamina, à la ligne dure, et les factions de sa coalition disparate, a au contraire subi une défaite cuisante lors d’un vote qu’il aurait décrit comme un référendum sur le nouveau gouvernement. Le vote signifie que la loi sur la citoyenneté et l’entrée en Israël, promulguée à titre temporaire en 2003, au plus fort de la deuxième intifada (« soulèvement »), doit maintenant expirer à minuit mardi.

En vertu de ce texte, les citoyens arabes, qui représentent un cinquième de la population israélienne, n’ont eu que peu ou pas de possibilités de faire venir en Israël leurs conjoints originaires de Cisjordanie et de Gaza. Ses détracteurs, dont de nombreux législateurs arabes et de gauche, estiment qu’il s’agit d’une mesure raciste visant à limiter la croissance de la minorité arabe d’Israël, tandis que ses partisans affirment qu’elle est nécessaire pour des raisons de sécurité et pour préserver le caractère juif d’Israël.

Jusqu’à présent, chaque année, la loi avait été renouvelée, et semblait avoir le soutien d’une large majorité au Parlement, dominé par des partis nationalistes purs et durs. Mais le parti du Likoud (droite) de l’ancien Premier ministre, Benjamin Nétanyahou, et ses alliés, ont décidé de s’y opposer pour mettre Bennett dans l’embarras et nuire à sa coalition, qui comprend un ensemble de huit partis de tout l’éventail politique, dont un petit parti arabe islamiste.

La ministre de l’Intérieur, Ayelet Shaked, membre du parti Yamina de Bennett, a déclaré que la décision de l’opposition de bloquer le renouvellement de la loi entraînerait des milliers de demandes de citoyenneté supplémentaires. Elle a accusé Nétanyahou et ses alliés de choisir « une politique mesquine et laide, et de laisser le pays brûler ». Amichai Chikli, un membre « renégat » de Yamina qui a voté avec l’opposition, a déclaré que le résultat était le signe de problèmes plus profonds.

« Israël a besoin d’un gouvernement sioniste qui fonctionne, et non d’un patchwork dépareillé qui dépend » du vote des législateurs arabes, a déclaré Chikli, seul membre de son parti à s’opposer au nouveau gouvernement dirigé par la coalition le mois dernier. De son côté, Nétanyahou, évincé par la nouvelle coalition après 12 ans comme Premier ministre, a clairement indiqué ses objectifs politiques. « Avec tout le respect dû à cette loi, l’importance de renverser le gouvernement est plus grande », a déclaré l’ancien chef du gouvernement lundi.

Naftali Bennett aurait proposé un compromis aux membres libéraux de la coalition, qui aurait prolongé la loi de six mois tout en offrant des droits de résidence à quelque 1 600 familles arabes, soit une fraction des personnes concernées. Mais la mesure a été rejetée, en partie parce que deux membres arabes de la coalition se sont abstenus. Le vote a révélé les profondes divisions et la fragilité du nouveau gouvernement. Tout en donnant un peu d’espoir aux familles arabes, affectées par ce texte discriminatoire depuis 2003, qui ne s’applique pas aux quelque 500 000 colons juifs vivant en Cisjordanie.

 

Crédits photo : Manifestation précédant le vote au Parlement israélien du renouvellement de la loi interdisant aux citoyens arabes d’Israël d’accorder la citoyenneté ou la résidence à des conjoints originaires de Cisjordanie et de Gaza, lundi 5 juillet 2021 (AP Photo/Tsafrir Abayov).

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