Les femmes et le marketing désastreux du 8 mars

Les femmes, en Tunisie et en Algérie, restent malheureusement au service des mâles politiques en manque de voix.

Le 8 mars dernier, j’allais écrire un statut Facebook pour dire ce que cette journée m’inspire. A savoir : lutte, égalité et leadership féminin. Mais j’ai fini par changer d’avis. Et n’ai écrit, en fin de compte, sur aucun réseau social ; pas plus que je ne me suis adressée à quelqu’un – ou presque.

Le fait est que, tout simplement, la toile m’en a dissuadée. L’hypocrisie de certains, le politiquement correct d’autres ; l’ignorance ou la maladresse, globalement, m’ont passablement énervée. Et ce ne sont pas seulement les quidams du net qui en sont les auteurs ; l’amateurisme des responsables en matière de droits des femmes et d’égalité des genres m’a déçue.

En tant que Tunisienne, ne devrais-je pas être satisfaite des avancées réalisées en matière de droits des femmes ? De cette législation plutôt en faveur de la femme et de notre statut, partant, d’ « exception » dans ce « monde arabe » ? C’est ce que se demandent certains, non sans rappeler le discours benaliste qui souhaitait tirer partie de l’image marketée de la femme tunisienne – ainsi que de sa femme, Leila Trabelsi. La forme était certes bonne, mais le fond laisse toujours à désirer.

D’autres me taxeront de nihiliste, d’excitatrice et de rebelle : la femme tunisienne est libre, elle travaille dur aux côtés de l’homme et la loi lui accorde « beaucoup d’avantages ». N’est-ce pas ? Et en tant qu’Algérienne, également, des troisièmes me diront que les femmes d’Alger ne se sont jamais mieux portées. Diarrhée verbale que cette rhétorique. Car, non, de la même manière qu’en Tunisie, en Algérie la femme ne se porte pas bien.

Mâles politiques

Le premier pays confère des droits écrits noirs sur blanc ? Peut-être. Mais il me tarde d’en jouir tout le temps. Et partout. D’où mon dégoût face aux bêtises accumulées en cette journée du 8 mars ; ces fleurs et ces coeurs en notre honneur prétendu. Alors que la simple possibilité d’être reconnues et traitées en tant que personne, au même rang que les hommes, habite les femmes. Rien de plus.

Voir la manière dont certains rendent hommage à la femme grâce à des poèmes et de belles citations ; voir ces mêmes hommes traiter la femme ni plus ni moins comme un objet sexuel le reste de l’année est nauséeux. Quand cesserons-nous cette hypocrite mascarade ? Quand comprendrons-nous que les femmes ne veulent pas de publicité ni de mots bleus mais, plutôt, tous les compartiments de l’égalité ?

Inutile de nous voiler la face ; celle-ci ne viendra pas des hommes ni de nos gouvernements – souvent bien peu soucieux de la condition féminine. Non. L’égalité viendra de l’union des femmes et des partisans, quels qu’ils soient, de l’inclusion. Ceci en entreprise comme en société. Il est nécessaire d’assurer la promotion d’un leadership féminin, capable de casser les codes et d’inverser la donne socioéconomique.

Pour que la femme cesse d’être trompée, dans le verbe et dans le geste, et servir de caution à des mâles politiques en mal de voix, commençons par faire de cette journée du 8 mars, non plus celle des femmes, mais le 67ème – ou 68ème – jour de l’année. Point.

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