Plusieurs pays seraient intéressés par la reconstruction du port de Beyrouth et de ses environs.
Les représentants de plusieurs entreprises allemandes ont présenté vendredi un plan de plusieurs milliards de dollars pour reconstruire le port de Beyrouth et les quartiers environnants, dévastés par l’explosion le 4 août dernier de près de 3 000 tonnes de nitrate d’ammonium – un produit chimique hautement explosif utilisé dans les engrais -, qui a tué 211 personnes et en a blessé plus de 6 000.
Le produit était stocké dans un entrepôt portuaire depuis des années. L’explosion – l’une des plus grandes explosions non nucléaires de l’histoire – a gravement aggravé la crise économique du Liban, et a plongé des centaines de milliers de personnes dans une pauvreté soudaine.
Corruption généralisée
Plusieurs pays seraient intéressés par la reconstruction du port et de ses environs, notamment la Turquie et la Chine, mais le consortium allemand, dirigé par Hamburg Port Consulting et Colliers, a été le premier à se rendre au Liban avec un plan finalisé qu’il a présenté aux responsables libanais.
Le port de Beyrouth, avec une superficie de 1,2 million de mètres carrés, est de loin le plus grand du Liban, pays de 5 millions d’habitants situé sur un carrefour méditerranéen stratégique entre l’Asie et l’Europe.
Mais la proposition de reconstruire le port ne peut être mise en œuvre tant qu’un nouveau gouvernement n’est pas formé. Et, comme la plupart des donateurs internationaux et des entreprises étrangères, la délégation allemande a clairement indiqué qu’aucune somme ne serait dépensée au Liban avant que des réformes majeures ne soient entreprises pour lutter contre la corruption généralisée.
« L’argent circule là où va la confiance », a déclaré aux journalistes Suheil Mahayni, directeur général de Hamburg Port Consulting, à la fin de la visite. Selon lui, un nouveau gouvernement au « pays du Cèdre » devrait assurer « une transparence totale afin que l’argent investi soit dépensé au profit du peuple libanais. »
« Réformes substantielles »
Après la guerre civile de 1975-1990 au Liban, une société privée avait été chargée de reconstruire le centre-ville de Beyrouth. Ce qui donna lieu à la construction de grattes-ciel avec des appartements de plusieurs millions de dollars et des restaurants et magasins hors de portée pour de nombreux Libanais.
Le bureau du Premier ministre intérimaire du Liban, Hassan Diab, a déclaré avoir rencontré la délégation allemande jeudi et avoir reçu son « étude préliminaire sur la manière de réactiver le port de Beyrouth pour le commerce et le tourisme ». Sans autres détails.
Le gouvernement libanais a démissionné quelques jours seulement après l’explosion du port. En octobre dernier, l’ancien Premier ministre Saad Hariri a été nommé pour former une nouvelle équipe, ce qu’il n’a pas réussi à faire depuis, en raison de querelles politiques. Entre-temps, le pays s’est enfoncé dans la crise, la monnaie nationale ayant perdu environ 85 % de sa valeur.
Les bailleurs de fonds internationaux exigent désormais que le Liban mette en œuvre des changements (politiques, économiques) afin d’obtenir les prêts et les subventions promis lors de la conférence économique CEDRE à Paris en avril 2018 (11 milliards de dollars). Pour l’instant, l’argent demeure bloqué, sans l’assurance que les fonds seront « bien » dépensés dans ce pays miné par la corruption.
L’ambassadeur d’Allemagne au Liban, Andreas Kindl, a d’ailleurs déclaré que la communauté internationale était d’accord sur ce point-là : il n’y aura pas de soutien financier pour la reconstruction du port de Beyrouth avant la mise en place « de réformes substantielles, de réformes crédibles, de réformes économiques et politiques. »
Crédits photo : AP/Hussein Malla