A Dubaï, Fernando Botero ressuscite la nature morte

L’exposition organisée à la Custot Gallery Dubaï est le premier « solo show » consacré au peintre colombien au Moyen-Orient.

Davantage connu pour ses personnages aux formes rondes et voluptueuses – directement hérités de l’art précolombien -, Fernando Botero a décidé de mettre en lumière ses natures mortes. Une manière, pour le peintre et sculpteur de 86 ans, de rendre hommage à ce genre artistique, et « nous imposer son émotion poétique devant la beauté qu’il a entrevue dans [certains] objets et leur assemblage », pour reprendre le mot de Charles Sterling, historien de l’art français et spécialiste de la nature morte.

Fernando Botero dans son atelier.

« Ces natures mortes vont être montrées pour la première fois, je les ai gardées dans ma collection personnelle car elles sont spéciales pour moi », explique l’artiste colombien à Stéphane Custot, le fondateur de la galerie dubaïote. L’une d’entre elles, Nature morte à la mandoline, a une place à part dans sa collection, puisque Fernando Botero ne connaitra le véritable succès qu’à partir de sa création, en 1956. A l’époque, il est de retour en Colombie, après avoir vadrouillé en France et en Italie :

« J’avais toujours cherché à rendre le monumental dans mon œuvre. Un jour, après avoir énormément travaillé, j’ai pris un crayon au hasard et j’ai dessiné une mandoline aux formes très amples comme je le faisais toujours. Mais au moment de dessiner le trou au milieu de l’instrument, je l’ai fait beaucoup plus petit et, soudain, la mandoline a pris des proportions d’une monumentalité extraordinaire », confiait l’artiste en 2002 (Botero : entretien de Fernando Botero avec Juan Carlos Botero, Jean-Marie Tasset, Cercle d’art, 2002).

Sensualité

Pique-nique, 2002, huile sur toile, 115 x 167 cm (courtesy de Custot Gallery Dubai et de l’artiste).

La toile représente un moment charnière pour le peintre, en même temps qu’un retour aux sources, puisque Fernando Botero a réalisé sa première nature morte à l’aquarelle à l’âge de 15 ans, se souvient-il auprès de Stéphane Custot. Comme s’il avait pris une profonde inspiration dans ses désirs enfantins, les objets inanimés deviennent alors ses modèles fétiches ; les formes exagérées son mode d’expression. « Nature morte à la mandoline a été marquant dans mon évolution. Je l’ai créée avec des contours généreux mais les détails étaient plus petits. Ensuite, les formes sont devenues plus affirmées et plus sensuelles. »

C’est précisément cette sensualité que la Custot Gallery Dubaï, située dans le centre névralgique de la capitale émiratie pour l’art, nous invite aujourd’hui à (re)découvrir, jusqu’au 10 février 2019. Une occasion très spéciale pour Fernando Botero, qui regrette que « les artistes actuels ne [soient] plus intéressés par ce thème [de la nature morte]. C’est dommage car ce genre a connu une grande tradition d’œuvres d’art ». Mais les objets ne meurent jamais vraiment.

« Fernando Botero, A still life retrospective », Custot Gallery Dubai, Alserkal avenue, jusqu’au 10 février 2019.

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