Jordanie : la loi sur la nationalité fait tristement débat

La loi jordanienne sur la nationalité engendre de lourdes discriminations envers les enfants dont le père est un ressortissant étranger.

Et pour cause, ce texte datant de 1954 trouve une base totalement patriarcale puisque seuls les Jordaniens sont susceptibles de transmettre la nationalité jordanienne à leurs enfants. Ce dispositif exclut ainsi de facto les femmes mariées avec des étrangers.

Les enfants issus de cette configuration familiale démarrent dès lors leur existence avec une sérieuse épine dans le pied, souligne Slate qui est allé à la rencontre d’Aroub Soubh, une jordanienne mariée à un irakien. L’intéressée, qui représente la coalition My nationality is the right of my family, dépeint ainsi une situation totalement ubuesque, c’est un euphémisme :

« Quand mes deux enfants auront 18 ans, je ne serai pas en mesure de leur payer des études. Et même si je le pouvais, ils n’auront sûrement pas d’avenir ici. Que devrons-nous faire ? Quitter le pays ? C’est mon pays, je ne veux pas partir, c’est aussi celui de mes enfants, où ils sont nés et ont grandi », déplore-t-elle.

Avant de tirer à boulets rouges sur une législation nationale rétrograde : « Cette loi a des répercussions concrètes au quotidien. Ni nos maris ni nos enfants ne peuvent par exemple bénéficier d’une couverture sociale, et nous devons souscrire des assurances médicales privées onéreuses. Pire, nous devons aussi payer le double des frais demandés aux étudiants jordaniens pour l’entrée à l’Université car nos enfants sont considérés comme étrangers dans leur propre pays ! »

Un système archaïque 

Malheureusement, la situation ne s’arrête pas là puisque les époux et les enfants concernés ne peuvent pas candidater à un poste dans la fonction publique, ni investir ou acquérir une propriété sur le territoire. « Le travail au noir demeure donc dans bien des cas la seule solution pour survivre » confirme A. Soubh.

Effondrée, cette dernière évoque dans la foulée une autre épée de Damoclès planant sur ces familles sinistrées, le risque d’expulsion : « Au-delà des difficultés économiques, nos familles ne peuvent pas se projeter dans l’avenir, car elles savent qu’à tout moment l’un des enfants peut être expulsé du pays. Récemment, un jeune homme qui souffrait de troubles mentaux a par exemple été arrêté par la police et menacé d’expulsion », témoigne la militante. « Finalement, sa mère a réussi à empêcher le pire, mais difficilement, et l’épisode a évidemment laissé des traces chez son fils », fustige-t-elle.

Pour rappel, la Jordanie est signataire de la Convention internationale pour l’élimination de toute forme de discriminations à l’égard des femmes.

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