Égypte : le militant Alaa Abdel-Fattah, incarcéré, obtient la citoyenneté britannique

En Égypte, un grand nombre des principaux militants impliqués dans le soulèvement de 2011 sont maintenant en prison.

Un militant égyptien pour la démocratie, emprisonné depuis plus de trois ans et demi, a obtenu un passeport britannique, a annoncé sa famille lundi. Cette démarche vise probablement à faire pression sur les autorités égyptiennes pour qu’elles le libèrent.

« Alaa Abdel-Fattah, un dissident au franc-parler, s’est fait connaître lors des soulèvements pro-démocratiques de 2011 qui ont balayé le Moyen-Orient et renversé en Égypte le président de longue date Hosni Moubarak », rappelle l’agence américaine Associated Press (AP). Ce militant de 40 ans a passé la majeure partie de la dernière décennie derrière les barreaux, et sa détention est devenue un symbole du retour de l’Égypte à un régime autocratique.

Il a été condamné pour la première fois en 2014 après avoir été reconnu coupable d’avoir participé à une manifestation non autorisée et d’avoir prétendument agressé un policier. Il sera libéré en 2019 après avoir purgé une peine de cinq ans, mais a été arrêté à nouveau plus tard cette année-là, dans le cadre d’une répression qui a suivi de rares manifestations antigouvernementales.

En décembre, Alaa Abdel-Fattah a été condamné à cinq ans de prison après avoir été reconnu coupable de diffusion de fausses nouvelles. Le militant est également accusé d’utilisation abusive des médias sociaux et d’avoir rejoint un groupe terroriste, en référence aux Frères musulmans, que les autorités égyptiennes ont déclaré organisation terroriste en 2013.

L’année dernière, la famille d’Alaa Abdel-Fattah et ses avocats égyptiens ont accusé les autorités pénitentiaires de la prison de Tora, au Caire, de l’avoir torturé et de lui avoir refusé des droits juridiques fondamentaux. Ils ont également demandé aux procureurs d’enquêter sur ces allégations.

La famille du militant a déclaré lundi qu’il avait obtenu la nationalité britannique par l’intermédiaire de sa mère, Laila Soueif, professeure de mathématiques à l’université du Caire, et née à Londres. L’entourage d’Alaa Abdel-Fattah a déclaré qu’elle cherchait à obtenir un passeport britannique pour son fils, afin de sortir de cette « épreuve impossible ».

« Détenu illégalement »

Sa famille a également demandé une enquête sur les violations présumées de ses droits depuis son arrestation en septembre 2019. Alaa Abdel-Fattah n’est même pas autorisé à communiquer avec les avocats de sa famille, au Royaume-Uni, et ne peut recevoir de visite consulaire en prison. Celui-ci a d’ailleurs entamé une grève de la faim au début du mois, afin de protester contre des violations présumées à son encontre. Mais pas que.

« Il s’agit d’un citoyen britannique détenu illégalement, dans des conditions épouvantables, simplement pour avoir exercé ses droits fondamentaux à l’expression pacifique et au rassemblement », a déclaré à AP Daniel Furner, l’un des avocats de la famille. Le ministère des Affaires étrangères du Royaume-Uni n’a pas répondu, pour l’instant, à une demande de commentaire.

L’obtention d’un passeport occidental pourrait être un moyen pour Alaa Abdel-Fattah d’être libéré. Ces dernières années, une poignée de militants possédant la double nationalité ont été contraints de renoncer à leur citoyenneté égyptienne comme condition à leur libération, une manœuvre juridique qui permet aux autorités d’expulser les étrangers accusés de crimes.

Le gouvernement du président Abdel Fattah al-Sissi, un allié des États-Unis qui entretient des liens économiques étroits avec les pays européens, réduit implacablement les dissidents au silence et réprime les organisations indépendantes, depuis des années, par des arrestations et des restrictions. Un grand nombre des principaux militants impliqués dans le soulèvement de 2011 sont maintenant en prison, la plupart en vertu d’une loi répressive adoptée en 2013, interdisant effectivement toute manifestation de rue.

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