La communauté internationale se réunit à Berlin au chevet de la Libye

La communauté internationale va se pencher une nouvelle fois au chevet de la Libye au cours d’un sommet international à Berlin le 23 juin prochain. Dans les coulisses, la Turquie s’active pour peser sur l’avenir du pays, au risque d’accentuer les divisions dans le pays.

La communauté internationale va se pencher une nouvelle fois au chevet de la Libye au cours d’un sommet international à Berlin le 23 juin prochain. Dans les coulisses, la Turquie s’active pour peser sur l’avenir du pays, au risque d’accentuer les divisions dans le pays.

La première élection présidentielle de l’histoire de la Libye pourra-t-elle bien se tenir comme prévu le 24 décembre prochain ? Alors que la classe politique libyenne se divise à nouveau autour des modalités d’organisation du scrutin, le risque d’un retour du chaos a convaincu la communauté internationale de se réunir à Berlin sous l’égide de l’Allemagne le 23 juin prochain.

Des représentants de la Mission d’appui des Nations unies en Libye (MANUL), le Secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres et les représentants de 12 pays dont la Russie et les Etats-Unis sont attendus au cours dans la capitale allemande pour prendre de nouvelles mesures pour stabiliser la situation dans le pays.

 

Dépasser l’échec du premier sommet de Berlin

 

La conférence internationale de Berlin fait suite à une première rencontre dans la capitale allemande en janvier 2020. Celle-ci n’avait pas abouti sur un accord inter-libyen mais s’était modestement résumée à un appel à la désescalade et à la fin des ingérences étrangères dans le pays. Le nouveau sommet se veut plus ambitieux en profitant du cessez-le-feu conclu depuis l’année dernière entre les différentes forces politiques dans le pays.

En invitant le gouvernement de transition dirigé par Abdel Hamid Dbeibah à y participer à l’exclusion des autres acteurs comme les partisans du maréchal Haftar, le gouvernement allemand veut aussi légitimer le nouvel exécutif libyen qui représente selon la diplomatie allemande un « espoir prudent d’apaisement des tensions ».

A peine quelques mois après sa nomination, le nouveau premier ministre s’est cependant déjà vu fragiliser par un scandale de corruption et par le blocage de son budget par le Parlement libyen. Le gouvernement doit aussi faire face aux polémiques qui visent le travail du Forum de dialogue politique chargé de préparer la loi électorale, et qui est accusé d’être noyauté par les Frères musulmans et de se montrer trop sensible à l’influence d’Ankara.

 

La Turquie à la manœuvre

 

Également invitée au sommet de Berlin, la Turquie a trouvé un allié dans le gouvernement Dbeibah pour renforcer sa présence et son influence dans le pays. Dès son arrivée au pouvoir, le premier ministre libyen a en effet multiplié les gestes de rapprochement envers Ankara et cherche à renforcer la coopération entre les deux pays.

Vu de Turquie, la reconstruction en Libye est un marché prometteur pour ses entreprises nationales. Mais le pays est aussi un espace stratégique à investir pour renforcer son influence en Méditerranée orientale. L’armée turque, qui a notamment empêché la prise de Tripoli par le maréchal Haftar durant le siège de la ville, a installé plusieurs bases militaires sur le sol libyen dont une base navale à Misrata pour peser davantage face à la Grèce et Chypre. Grâce au renforcement de ses liens avec le gouvernement d’Abdel Hamid Dbeibah, le président turc a obtenu du premier ministre libyen son ralliement à un accord de délimitation maritime favorable à Ankara, mais rejeté par les Etats voisins.

 

Des ambiguïtés à lever

 

Le rapprochement du gouvernement de transition de Dbeibah avec la Turquie fait cependant grincer des dents parmi certaines des forces politiques du pays, qui se sont opposées aux fondamentalistes islamistes alliés d’Ankara après la chute de Mouammar Kadhafi en 2011. Au cours de la deuxième guerre civile libyenne, Erdogan s’est en effet montré le principal soutien des Frères musulmans en Libye et du Gouvernement d’union nationale de Fayez al-Sarraj à Tripoli. Un passif qui sème le doute sur un ralliement franc et sincère d’Ankara en faveur d’une solution inclusive qui la désavantagerait mécaniquement.

La proximité diplomatique stratégique de la Turquie et de l’Allemagne interroge aussi les diplomates internationaux sur la motivation de Berlin à faire de la représentation de toutes les forces politiques libyennes une solution sine qua non de résolution de la crise. Ces ambiguïtés devront être levées rapidement à Berlin à la fin du mois de juin, au risque de faire du sommet un nouveau rendez-vous manqué pour la paix en Libye.

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