Le vaste plan économique repose en partie sur la privatisation du géant pétrolier Aramco, qui ne serait plus à l’ordre du jour.
En Arabie saoudite, la « Vision 2030 » fait son petit bonhomme de chemin. Le vaste plan protéiforme que porte Riyad depuis quelques années pour décorréler son économie du pétrole – notamment – avance petit à petit. Et malgré tout. C’est, tout d’abord, le Centre national pour la privatisation et partenariats public-privé, qui a présenté dimanche dernier le projet de loi sur la participation du secteur privé ; conformément aux objectifs du plan saoudien, la contribution des entreprises à la richesse nationale doit effectivement grimper de 40 à 65 %. Le but ? Organiser des partenariats entre le gouvernement et le secteur privé afin de lancer des projets de plusieurs milliards de dollars et attirer ainsi de nouveaux investissements étrangers.
« Privatisation massive »
« Le projet de loi exempte les coentreprises avec le secteur privé de certaines exigences du droit du travail et de certaines des restrictions sur les biens immobiliers, illustre par exemple le média pro-saoudien Al-Arabiya. Ainsi, certaines entreprises feront preuve d’une plus grande souplesse dans l’application des exigences de l’Arabie saoudite. » Le projet de loi permet également une plus grande flexibilité dans la détention de biens immobiliers, et permet même la propriété étrangère dans des projets conjoints avec le gouvernement, dans des secteurs comme la santé ou l’éducation. Avec l’assurance que les autorités saoudiennes n’iront pas fouiner en retour dans les affaires de la partie privée, assure le pure player.
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A l’arrivée, le « Programme de privatisation » made in Arabie saoudite, dont les engagements devront être respectés d’ici 2020, prévoit une contribution au PIB de l’ordre de 13 à 14 milliards de riyals (environ 3 milliards de dollars) et des recettes publiques grossies de 35 à 40 milliards de riyals (entre 9 et 11 milliards de dollars) grâce à la privatisation massive. En termes d’économies nettes, cela représente entre 25 et 33 milliards de riyals (soit de 6 à 9 milliards de dollars). 16 entités gouvernementales se verront privatisées et une centaine de partenariats public-privé verra le jour, tandis que 40 % des 540 initiatives du plan « Vision 2030 » seront portés par des financements privés.
« L’Arabie saoudite retrouve une position confortable »
Surtout, Riyad entend céder une partie son géant pétrolier, Aramco, dont la mise en bourse de 5 % de son capital devrait rapporter au royaume quelque 100 milliards de dollars – sur une valorisation globale estimée à 2 000 milliards de dollars. Problème : l’opération, prévue pour 2018, risque de déborder sur 2019 – voire plus loin. Le 5 juillet, le Wall Street Journal et l’agence Bloomberg annonçaient que les autorités saoudiennes étaient sur le point de renoncer à la cession. La raison ? « Saudi Aramco ne semble pas prête à l’exercice de transparence qu’exige une opération boursière » d’après Le Monde, qui avait pourtant recueilli il y a quelques semaines le témoignage plutôt enthousiaste du PDG du groupe.
Autre point d’achoppement : les acteurs du marché trouveraient le montant de la valorisation globale d’Aramco légèrement excessive. Mais c’est peut-être dans la hausse du prix du pétrole qu’il faut voir la réticence actuelle des Saoudiens à introduire en bourse leur joyau. « Avec un baril à près de 80 dollars, l’Arabie saoudite retrouve une situation confortable. Les finances publiques du royaume sont revenues à l’équilibre et le prince [héritier] Mohamed ben Salman a de nouveau de quoi financer sa guerre meurtrière contre le Yémen voisin » indique Le Monde. Normal que la privatisation du géant pétrolier sorte du rang des priorités. Paradoxalement, la « Vision 2030 » devait pourtant servir à désengager Riyad du tout-pétrole.
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