Liban : l’enquête sur l’explosion du port de Beyrouth réveille les tensions

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15.10.2021

Le gouvernement a appelé à une journée de deuil à la suite des affrontements armés survenus jeudi.

Les écoles, les banques et les bureaux du gouvernement, à travers le Liban, ont fermé vendredi, après que des affrontements armés entre des milices lourdement armées ont tué sept personnes et terrorisé les habitants de Beyrouth.

Le gouvernement a appelé à une journée de deuil à la suite de ces affrontements armés, au cours desquels des hommes armés ont utilisé des armes automatiques et des grenades propulsées par fusée dans les rues de la capitale, faisant écho à « l’époque la plus sombre de la nation », celle de la guerre civile de 1975 à 1990, selon l’agence américaine Associated Press (AP).

« Ces affrontements ont fait resurgir le spectre d’un retour de la violence sectaire dans un pays déjà aux prises avec l’une des pires crises économiques de ces 150 dernières années. »

La violence a éclaté jeudi lors d’une manifestation organisée par les deux principaux partis chiites – le Hezbollah et le Mouvement Amal – qui demandaient la révocation du juge principal chargé d’enquêter sur l’explosion massive survenue l’année dernière dans le port de Beyrouth. Des responsables des deux partis ont laissé entendre que l’enquête du juge tendait à les rendre responsables de l’explosion, qui a tué au moins 215 personnes.

De nombreux manifestants étaient armés et il n’a pas été possible de savoir qui a tiré le premier coup de feu, mais la confrontation a rapidement dégénéré en échanges de tirs nourris le long d’une ancienne ligne de front de la guerre civile séparant les zones majoritairement musulmanes et chrétiennes de Beyrouth. Des balles ont traversé les fenêtres des appartements du quartier. Les écoles ont été évacuées et les habitants se sont réfugiés dans des abris.

Contestations judiciaires

Les deux groupes chiites ont déclaré que leurs manifestants avaient essuyé des tirs de snipers déployés sur les toits, accusant la milice chrétienne de droite des Forces libanaises d’avoir déclenché les tirs. Le ministère de la Santé a indiqué qu’un blessé avait succombé à ses blessures, vendredi, portant le bilan à 7 morts. Parmi eux, Mariam Farhat, 45 ans, mère de cinq enfants, abattue par une balle de sniper alors qu’elle était assise près de la porte du balcon de son appartement situé au deuxième étage (selon sa famille).

« Les tensions liées à l’explosion du port ont contribué aux nombreux problèmes du Liban, notamment l’effondrement de la monnaie, l’hyperinflation, la montée en flèche de la pauvreté et une crise énergétique qui a entraîné de longues coupures d’électricité », rappelle AP.

Le juge chargé de l’enquête, Tarek Bitar, a d’ores et déjà inculpé et lancé un mandat d’arrêt à l’encontre de l’ancien ministre libanais des Finances, un membre important du Mouvement Amal et un proche allié du Hezbollah. Le magistrat a également inculpé trois autres anciens hauts responsables du gouvernement pour homicide volontaire et négligence ayant entraîné l’explosion.

Les responsables des deux partis chiites, Amal et le Hezbollah, y compris le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, ont ciblé M. Bitar pendant plusieurs jours, l’accusant de politiser l’enquête en inculpant et en convoquant certains responsables et pas d’autres. Ce dernier est le deuxième juge à diriger cette enquête, son prédécesseur ayant été démis de ses fonctions à la suite de contestations judiciaires.

 

 

Crédits photo : Un homme se tient sur son balcon criblé de balles, lors des affrontements meurtriers qui ont éclaté jeudi le long d’une ancienne ligne de front de la guerre civile, entre les zones musulmanes chiites et chrétiennes, dans le quartier d’Ain el-Remaneh, à Beyrouth, au Liban, vendredi 15 octobre 2021 (AP Photo/Bilal Hussein).

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