Pour Martin Griffiths, l’envoyé spécial de l’ONU au Yémen, le retrait des Houthis de la zone portuaire ne suffit pas.
Jeudi 16 mai, dans la matinée, une vingtaine de frappes aériennes de la coalition saoudienne a touché Sanaa (nord), la capitale du Yémen aux mains des rebelles Houthis, tuant au moins 7 civils, dont 4 enfants, et blessant une soixantaine de personnes. Les bombes ont visé 9 sites militaires, qui se trouvaient dans et autour de la ville selon Reuters, en réponse à une attaque par drone perpétrée mardi dernier par les Houthis sur des installations pétrolières saoudiennes.
« Une pluie de bombes »
« Une pluie de bombes nous a réveillés ce matin, faisant trembler les fenêtres et le sol. Certaines sont tombées juste à côté de chez nous mais, contrairement à d’autres, nous avons eu de la chance, témoigne Alexandra Hilliard, porte-parole de l’ONG Care dans la première ville du pays. Dans l’un des quartiers résidentiels de Sanaa, une famille a été tuée dans son sommeil. Seule une petite fille a survécu. »
Les frappes de la coalition arabe sont intervenues quelques heures après la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) sur le retrait des troupes rebelles de la ville portuaire de Hodeïda (ouest). Une étape essentielle du processus de paix dont les contours avaient été délimités en décembre dernier, à Stockholm, avec les parties belligérantes.
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« La Mission des Nations unies en appui à l’Accord sur Hodeïda a confirmé que les Houthis ont pleinement coopéré tout au long du retrait [qui a eu lieu entre le 11 et le 14 mai], a déclaré à l’issue de la réunion Martin Griffiths, l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU au Yémen. Les forces militaires rebelles ont maintenant quitté les trois ports d’Hodeïda, de Salif et de Rass Issa. » Ce qui permettra selon lui à l’ONU d’apporter son aide à la Compagnie des ports de la mer Rouge, chargée de la gestion des installations portuaires – la coalition saoudienne et le gouvernement yéménite craignant que les Houthis n’acheminent des armes par voie maritime.
« A la croisée des chemins »
Martin Griffiths a toutefois averti qu’il ne s’agissait que d’un début. « Ces redéploiement doivent être suivis d’actions concrètes par les parties pour qu’elles s’acquittent de leurs obligations en vertu de l’accord de Stockholm. » A savoir : un retrait des troupes et une désescalade du conflit dans d’autres zones du Yémen, qui « reste à la croisée des chemins, entre guerre et paix. Si le cessez-le-feu à Hodeïda est généralement respecté, l’intensification du conflit dans d’autres parties du pays est alarmante », a mis en garde l’envoyé spécial onusien.
Des propos qu’illustrent parfaitement les attaques de ces derniers jours. « Alors que les frappes aériennes, les mines antipersonnel et les combats continuent de tuer des civils à travers le Yémen, le processus de paix parait plus fragile que jamais », abonde ainsi Alexandra Hilliard. Care de rappeler que, depuis le début conflit en mars 2015, quelque 20 000 frappes aériennes ont été effectuées. Et selon l’ACLED, un groupe de recherche britannique, les combats auraient fait plus de 70 000 morts. Auxquels il faut ajouter les victimes de malnutrition et de maladie.

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