« La première tâche à accomplir est de mettre en place la base constitutionnelle » du pays, a reconnu le Premier ministre de transition.
L’envoyé spécial des Nations unies (ONU) pour la Libye a accusé, jeudi, les « fauteurs de troubles » d’essayer d’entraver la tenue d’élections cruciales, en décembre prochain, pour unifier la nation nord-africaine divisée. Le Conseil de sécurité a quant à lui averti que tout individu ou groupe sapant le processus électoral pourrait faire l’objet de sanctions de l’ONU.
Jan Kubis a déclaré lors d’une réunion ministérielle du Conseil qu’il s’était entretenu avec de nombreux acteurs clés au cours de sa visite en Libye, et que tous avaient réitéré leur engagement en faveur de la tenue d’élections présidentielle et parlementaires le 24 décembre… Mais « je crains que beaucoup d’entre eux ne soient pas prêts à joindre le geste à la parole », a-t-il tempéré.
Feuille de route
Le diplomate a souligné l’incapacité du Forum de dialogue politique libyen, un organe composé de 75 membres issus de tous les horizons, à se mettre d’accord sur un cadre juridique permettant d’organiser des élections au début du mois, mettant ainsi en péril une feuille de route visant à mettre fin au conflit qui sévit depuis dix ans dans ce pays riche en pétrole.
Il a également pointé du doigt le fait que les forces étrangères et les mercenaires n’ont pas quitté la Libye « dans les 90 jours », comme l’exigeait le cessez-le-feu d’octobre dernier, tout en regrettant la non-réouverture de la route côtière reliant l’est et l’ouest du pays, autre disposition clé du cessez-le-feu.
La Libye est en proie au chaos depuis qu’un soulèvement soutenu par l’OTAN a renversé le dictateur de longue date, Mouammar Kadhafi, en 2011, et divisé le pays riche en pétrole entre un gouvernement soutenu par l’ONU dans la capitale, Tripoli, et des autorités rivales basées dans l’est du pays, chacune soutenue par des groupes armés et des gouvernements étrangers.
En avril 2019, le commandant Khalifa Haftar, basé dans l’est du pays, et ses forces, soutenues par l’Égypte et les Émirats arabes unis, ont lancé une offensive pour tenter de prendre Tripoli. Sa campagne de 14 mois s’est effondrée après que la Turquie a intensifié son soutien militaire au gouvernement soutenu par l’ONU avec des centaines de soldats et des milliers de mercenaires syriens.
« Éléments étrangers »
M. Kubis a exhorté les membres du Forum à mettre leur différend de côté et à se mettre d’accord sur une proposition de base constitutionnelle pour les élections, que la Chambre des représentants pourrait adopter immédiatement.
« Les groupes d’intérêt, les fauteurs de troubles et les acteurs armés ne doivent pas être autorisés à faire dérailler le processus visant à rétablir la légitimité, l’unité et la souveraineté de l’État libyen et de ses institutions », a-t-il souligné.
Une déclaration présidentielle adoptée par le Conseil de sécurité a fait écho à l’appel de M. Kubis en faveur d’une action immédiate et d’une législation permettant à la Haute Commission électorale nationale « de disposer du temps et des ressources nécessaires » pour préparer les élections.
Le Premier ministre libyen de transition, Abdel Hamid Dbeibé, a réitéré l’engagement du gouvernement en faveur des élections « historiques » du 24 décembre, et a déclaré que « la première des tâches à accomplir est de mettre en place la base constitutionnelle et la loi électorale nécessaire le plus rapidement possible ».
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, dont le pays assure la présidence du Conseil de sécurité et a présidé la réunion, a déclaré que le maintien de la date des élections du 24 décembre était « impératif », et a appelé à un calendrier progressif pour le départ des « éléments étrangers ».
Crédits photo : Jan Kubis, émissaire de l’ONU pour la Libye.