Depuis le 1er décembre 2019, plus de 700 000 personnes ont été déplacées par les combats, dans le nord-ouest de la Syrie.
C’est peu dire qu’il ne reste plus grand chose de l’accord de Sotchi, paraphé sur les bords de la mer Noire, en 2018, par la Russie et la Turquie, dont le but était d’éviter toute offensive sur la dernière poche de résistance en Syrie, Idlib, aujourd’hui en proie au chaos. A l’époque, les Nations unies (ONU) d’annoncer qu’elles craignaient la « pire catastrophe humanitaire » du vingt-et-unième siècle ? On s’en rapproche à grandes enjambées, à mesure que les promesses de désescalade s’affaissent dans le nord-ouest syrien.
Moscou, protectrice du régime de Damas, et Ankara, soutien des rebelles – qualifiés indistinctement de « terroristes » par Bachar al-Assad –, se rejetant la faute l’une sur l’autre, difficile d’y voir clair et de déterminer laquelle des deux parties n’a pas respecté l’accord. Tandis que les Russes reprochent aux Turcs de ne pas avoir su faire plier les rebelles liés à Al-Qaida pour qu’ils respectent les accords signés et quittent la zone, les seconds estiment qu’ils ont toute légitimité pour sortir de la région d’Idlib et aller attaquer l’armée syrienne, qui n’aurait pas pu se rapprocher comme elle l’a fait de la zone sans un appui – aérien – ni l’aval des Russes.
Une chose est sûre, cependant, le regain de tension a précipité des dizaines de milliers de civils sur les route, direction le nord-ouest de la province d’Idlib. Une menace plus ou moins directe pour la Turquie, qui a déjà fait face à un afflux de quelque 3,6 millions de réfugiés syriens. Depuis le 1er décembre 2019, ce sont plus de 700 000 personnes qui ont été déplacées par les combats, dans le nord-ouest de la Syrie, principalement dans les gouvernorats d’Idlib et Alep, la grande majorité étant des femmes et des enfants, dénonçait il y a quelques jours le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR).
Arrêt immédiat des combats
« Plus de 400 000 personnes ont été déplacées entre avril et août l’année dernière, souvent à plusieurs reprises, et beaucoup sont de plus en plus désespérées et en danger. La capacité d’absorption immédiate des sites existants pour les personnes déplacées à l’intérieur du pays a été dépassée, tandis que les villes et les villages sont surpeuplés par les nouveaux arrivants », avertissait également le HCR, pointant du doigt les conditions sur le terrain, « aggravées par des conditions climatiques hivernales extrêmes, notamment des inondations et des températures inférieures à zéro ».
Le Haut commissariat redoute à présent l’augmentation du nombre de déplacés, sur les routes du nord de la Syrie, tandis que les combats entre forces turques et armée syrienne s’amplifient et menacent désormais quelque trois millions d’habitants. La situation est telle que lorsqu’ils ne sont pas directement visés et détruits, les hôpitaux et les écoles, notamment, sont obligés de fermer. Un grand nombre de civils demeure ainsi privé de nourriture, de soins et tout simplement d’endroit pour vivre décemment. Ce que les leaders qui se partagent ce pays à feu et à sang refusent de voir.
Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan n’ont pour l’instant pas indiqué qu’ils souhaitaient se rencontrer. C’est-à-dire qu’ils devraient laisser les choses se faire d’elles-mêmes, dans le bruit et la fureur de combats, des déplacés et des victimes – la guerre en Syrie, depuis 2011, en compte pas moins de 500 000. L’occasion, peut-être, pour une Union européenne étrangement absente des débats, de montrer la voie, et de donner de la voix, surtout, pour que les civils cessent d’être instrumentalisés ? Il faudrait pour cela exiger l’arrêt immédiat des combats. Ce qui semble peu probable.
