Selon un rapport d’experts de l’ONU, les Houthis disposent depuis 2019 de nouvelles armes.
Samedi 15 février, 31 civils ont été tués et 12 autres blessés, lors des frappes qui ont touché la zone d’Al Hayjah dans le gouvernorat de Jawf (nord), a indiqué le Bureau des Nations unies (ONU) pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA). Dans un communiqué, Lise Grande, la coordinatrice humanitaire pour le Yémen, a fait part de ses « profondes condoléances », tout en pointant du doigt : « Tant de personnes sont tuées au Yémen, c’est une tragédie injustifiée. En vertu du droit humanitaire international, les parties qui ont recours à la force sont tenues de protéger les civils. Cinq ans après le début de ce conflit, les belligérants n’assument toujours pas cette responsabilité. C’est choquant. »
Théâtres de frappes
L’attaque a eu lieu après que les rebelles Houthis (chiites), les combattants opposés aux forces loyalistes yéménites depuis septembre 2014, et soutenus par l’Iran, ont annoncé avoir abattu la veille un avion de combat saoudien de la coalition militaire, « de type Tornado à l’aide d’un missile sol-air perfectionné ». Selon l’AFP, « un tel crash est rare depuis le début en 2014 du conflit au Yémen, où la coalition, dont les piliers sont l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, est intervenue en 2015 pour soutenir le pouvoir face aux rebelles qui contrôlent les régions du nord et de l’ouest du pays, ainsi que la capitale Sanaa. »
Comme l’ont noté plusieurs organisation humanitaires, dont Care, Oxfam et Save the Children, l’attaque de samedi fait suite à une autre survenue une semaine plus tôt, le 7 février dernier, contre le principal hôpital de Marib, qui accueille jusqu’à 15 000 personnes. « Un hôpital et une clinique mobile à proximité ont également été gravement endommagés. Ces attaques aveugles contre des établissements de santé, illégales en vertu du droit international, privent des milliers de Yéménites de l’accès à des soins de santé vitaux », ont-elles affirmé. Globalement, depuis la mi-janvier, Nihm, Jawf et Marib, dans le nord du Yémen, sont le théâtre de frappes aériennes et de violents combats, qui ont déjà forcé 28 000 civils à fuir leur domicile.
Rapport de force
Selon les organisations, qui ont appelé les parties au conflit au respect du droit international à la protection des civils, « ces événements menacent de faire basculer le pays vers une escalade majeure de violence, remettant en cause les chances de mettre fin au conflit. » Après le crash de l’avion saoudien, les Houthis ont par exemple diffusé des images présentées comme celles du tir du missile et du moment où l’avion est touché et s’écrase. Sur son compte Twitter, un porte-parole des rebelles, Mohamed Abdelsalam, a affirmé que « la destruction de l’avion est un coup dur pour l’ennemi, et témoigne de l’importante amélioration des capacités de défense » des Houthis.
« Au début du conflit, les Houthis étaient une milice hétéroclite qui se procurait les armes » dans le pays, a affirmé à l’AFP Fatima Abo Alasrar, une experte du Middle East Institute. « Aujourd’hui, ils ont massivement développé leur arsenal avec l’aide de l’Iran et du Hezbollah ». Et selon un rapport d’experts de l’ONU chargés de contrôler l’embargo imposé en 2015 au Yémen, les Houthis disposent depuis 2019 de nouvelles armes, dont certaines ressemblent à celles qui sont produites par la République islamique. Pour certains, ce regain de puissance de frappe pourrait provoquer un tournant dans la guerre au Yémen, en redistribuant les cartes en termes de rapport de force.
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