Franklin Azzi : « Depuis toujours, je sais que je suis libanais »

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17.04.2019

L’architecte, qui puise son inspiration dans ses origines libanaises, doit prendre part au « Grand Paris », notamment.

Le centre commercial Beaupassage à Paris, l’aménagement en promenade des quais de Seine, les bureaux du promoteur américain Hines à La Défense, les anciennes halles Alstom à Nantes, un hôtel design et un centre culturel pour enfants au sein d’EuropaCity, la réhabilitation de la tour Montparnasse… L’œuvre de l’architecte franco-libanais n’en finit pas de surprendre. Et cela ne fait que commencer !

« La lumière, les odeurs, les matériaux »

Ce n’est qu’en 2011, alors qu’il est déjà un créateur cosmopolite et audacieux, que l’architecte parisien se rend pour la première fois au Liban. Né en 1975, Franklin Azzi est diplômé de l’École spéciale d’architecture (ESA) de Paris, où il a été particulièrement marqué par les enseignements de Paul Virilio, philosophe et urbaniste français particulièrement sensible à l’intégration de l’architecture dans la vie sociale. Le jeune étudiant perfectionnera ensuite sa formation au sein de la prestigieuse Glasgow School of Art, en Écosse.

Considérée comme l’une des meilleures écoles d’art du monde, elle a constitué une étape inestimable dans le parcours du jeune parisien, dont l’horizon ne cesse de s’élargir. Pendant son service militaire, il rejoint les rangs de l’armée française, qui lui donne l’occasion de construire ses premiers bâtiments en Inde et en Turquie.

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C’est donc un homme habitué aux voyages et aux terres inconnues qui se rend au Liban en 2011. Pourtant, cette expérience demeure différente des autres, et structurante dans sa carrière, si bien qu’elle lui a laissé «un souvenir particulièrement fort. La lumière, les odeurs, les matériaux, le relief du paysage ». Tout était pour lui à la fois familier et inconnu, comme s’il avait toujours habité ce pays qu’il voyait pourtant pour la première fois. Ou comme si c’était le pays qui l’avait toujours habité : « Depuis toujours, je sais que je suis libanais », affirme en effet celui dont les origines libanaises remontent à son arrière-grand-père, un banquier ayant fait faillite à Beyrouth pendant la Première Guerre mondiale.

EuropaCity, tour Montparnasse : les défis ne font que commencer

Aujourd’hui, Franklin Azzi est « intimement persuadé » que ses origines ont modelé sa manière de travailler. « J’apporte une réelle attention aux détails, très présents aussi dans l’architecture libanaise dont les dessins et les ornements font partie intégrante des façades et des intérieurs », confie-t-il au Commerce du Levant.

Ce parcours riche et complexe a fait de lui le défenseur obstiné d’une « architecture globale » dans laquelle « l’interdisciplinarité compte énormément », comme le prouve chacun de ses projets. Ainsi, la réhabilitation d’un ensemble immobilier de 12 000 m2 sur l’avenue des Champs-Élysées a permis à son cabinet, Franklin Azzi Architecture (FAA), de « mêler les usages » afin de redynamiser cette adresse iconique de la capitale. Le système « en poupées russes », imaginé pour les halles Alstom (transformées en École supérieure de Beaux-arts), lui a permis de « libérer les espaces » de cet important patrimoine industriel de Nantes pour créer une zone d’expression d’une incroyable souplesse.

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La construction d’un hôtel design et d’un centre culturel pour enfants au sein de l’écoquartier EuropaCity lui offre, une nouvelle fois, l’occasion de participer à un projet global. Vaste zone de loisir et de divertissement bâtie dans le cadre du Grand Paris, EuropaCity doit sortir de terre en 2024 dans le Val-d’Oise et proposera des restaurants, une ferme urbaine, des boutiques, un musée… Mais aussi de nombreux hôtels, dont celui dessiné par Franklin Azzi, un bâtiment sous forme de collines verdoyantes, dont les façades se camouflent dans la nature.

Toujours au service de la vie sociale

L’architecte d’origine libanaise est aussi impliqué dans un autre projet essentiel pour le renouveau de la capitale : celui de la réhabilitation de la tour Montparnasse. Avec le collectif d’architectes « Nouvelle AOM », il est chargé de transformer le gratte-ciel « mal aimé » en véritable lieu de vie. A ce propos, pour Franklin Azzi, si la tour est aujourd’hui peu appréciée, c’est qu’elle est « noire et monolithique, alors qu’une part de ce désamour vient de son isolement. C’est une tour de bureaux propulsée dans un quartier d’habitation, un édifice imposé à toute une ville alors qu’il ne profite qu’à 5 000 personnes. Cela explique qu’elle n’ait jamais été acceptée, malgré le million de visiteurs annuels. D’où notre volonté d’élargir sa vocation. La tour doit proposer de nouvelles adresses pour différents publics ».

Elle accueillera donc un hôtel, un restaurant, des commerces et même une serre végétale sur le toit. Plus que jamais, il s’agit de rendre à l’espace son importance au sein de la vie sociale, comme le préconisait Paul Virilio.

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