En Palestine, la paix agonise et l’hypocrisie bat son plein

Le monde arabo-musulman n’a-t-il pas définitivement lâché les Palestiniens dans leur lutte avec Israël ?

Sans grande surprise, Donald Trump a appliqué sa décision de transférer l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem. Et d’en faire ainsi la capitale d’Israël, observant ainsi une loi adoptée par le Congrès américain en 1995, déjà – loi dont l’application avait toujours été reportée. Une décision choc pour la Palestine, en perte de moyens et à court de solidarité, tandis qu’une tragédie sanglante a eu lieu à Gaza, célébrée par les dirigeants américains à Jérusalem. Et raisonnant dans le monde arabe qui, lui, ne répond plus, fidèle à sa politique de l’autruche.

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Outre une colère populaire rapportée essentiellement par les réseaux sociaux, peu de marches de contestations ou d’actions de solidarités ont été organisées. D’un point de vue officiel, les Etats arabes se sont contentés de pondre quelques communiqués – certains à l’encre glaciale. Rien de nouveau. Il est assez clair que le conflit palestinien s’est érigé en affaire secondaire pour les gouvernements de la région. Mention spéciale à la Turquie, tout de même, qui a rappelé ses ambassadeurs à Israël et aux Etats-Unis – de manière temporaire.

« Spirale guerrière »

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a fustigé, un peu mais pas trop, le terrorisme d’Etat, en faisant allusion à l’Etat hébreu. Sur le continent africain, l’Afrique du Sud a fait de même – et sera ainsi l’exception. Et bien que les pays nord-africains n’aient pas de relations diplomatiques avec Israël, la question du rappel de leurs ambassadeurs des Etats-Unis ne semble pas se poser. Nul n’aurait-il le courage de se faire « couper les vivres », leur survie pouvant dépendre de leurs relations avec les Etats-Unis ?

En France, une partie de la classe politique et de l’opposition a crié au scandale et a déploré « ce qui se passe à Gaza », comme Jean-Luc Mélenchon, qui a appelé l’Elysée à convoquer l’ambassadeur d’Israël : « La France doit condamner les massacres à #Gaza. L’ambassadeur d’Israël à Paris doit être convoqué à l’Élysée pour s’expliquer. La paix agonise sous les coups de #Netanyahou » a tweeté le leader de la France insoumise. De son côté, l’ex-candidat socialiste à la présidence, Benoit Hamon, a déclaré sur RTL :

« Le gouvernement israélien et Trump sont responsables d’un bain de sang. La France doit sortir des formules de condamnation d’usage, mobiliser l’Union européenne et agir pour la reconnaissance de la Palestine. Il faut enrayer la spirale guerrière. »

Humanité

Dans la presse américaine, qui se montre guère tendre avec le locataire de la Maison Blanche depuis son arrivée au pouvoir, la tragédie de Gaza a été condamnée à l’unanimité, les médias estimant que, contrairement à ce qu’il prétend, Donald Trump ne cesse de faire reculer le processus de paix en Palestine. Même son de cloche pour les médias britanniques et français, le journal L’Humanité ayant même appelé à poursuivre le ministre des Affaires étrangères israélien pour « crime de guerre ».

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Certains journaux arabes, quant à eux, signe d’un désintérêt flagrant, n’ont même pas pris la peine de consacrer leur Une à la tragédie de Gaza. Anecdotique ? Sûrement pas. La Palestine, acteur oublié du monde arabe, est seule. Et doit changer de stratégie. L’ère où les Palestiniens pouvaient compter sur le soutien de la communauté arabo-musulmane est révolue ; la géopolitique moyenne-orientale, d’ailleurs, connait une redistribution des cartes majeure, l’Arabie saoudite – et d’autres – se rapprochant d’Israël pour contrer l’Iran.

Par leurs actes ou l’absence de réaction, les Etats arabes se sont, quelque part, rendus complices de la dégradation du dossier palestinien en faveur de Tel-Aviv. L’étiquette religieuse, arabe ou tiermondiste ne tient plus. C’est désormais une certitude. Mais au-delà du champ politico-religieux, n’est-il pas (surtout) question d’humanité, alors que les Gazaouis sont tombés par dizaines, lundi dernier ? L’heure n’est-elle pas venue, pour les militants, de faire en sorte que la question palestinienne soit abordée sous l’angle de l’humain ?

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