En Algérie, les étudiants ne désarment pas

Mardi 18 juin, tout comme les semaines précédentes, les étudiants algériens ont appelé à la fin du système au pouvoir.

En Algérie, la rue n’est pas près d’abdiquer. Alors que les symboles de l’ « ancien régime » refusent de tomber, plus de deux mois après la démission d’Abdelaziz Bouteflika, des milliers d’étudiants ont battu le pavé, mardi à Alger, pour la 17ème semaine consécutive. Avec, sur leurs pancartes, des slogans anti-système, ou tout simplement pour la démocratie : « Pas confiance dans les symboles des gangs » « Presse transparente pour un citoyen clairvoyant » ; « Algérie libre et démocratique ». Certains d’entre eux ont même vertement critiqué les médias, en criant : « Sahafa chyatine » (« Médias flagorneurs »).

Les anciens proches du clan Bouteflika, évidemment, en ont pris pour leur grade. Parmi eux, surtout, le chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah, qui tente pourtant de prendre ses distances avec l’ancien président. Dans les rues, les « Gaïd Salah dégage ! » et autres « Arrêtez de jouer, le pouvoir au peuple » ont résonné, sous l’œil des services de sécurité, qui « ont suivi la marché de près, sans toutefois la gêner », indique le quotidien algérien El Watan.

« Nous continuerons à descendre dans la rue »

Tout comme les mardis précédents, les étudiants algériens, globalement, ont appelé à la fin du régime militaire de fait, qui dure depuis plus de deux mois. Certains n’hésitant pas à le comparer à un « régime dictatorial ». Pour une grande majorité d’observateurs, l’armée ne fait effectivement ni plus ni moins que pérenniser son emprise sur le pouvoir. Judiciaire notamment. Halim Feddal, le secrétaire général de l’Association nationale de lutte contre la corruption en Algérie, de critiquer par exemple la lutte anticorruption actuellement conduite par Ahmed Gaïd Salah. La justice du pays étant, selon lui, « instrumentalisé[e] par le pouvoir exécutif ».

La semaine dernière, les étudiants ont d’ailleurs brandi cette emprise du système pour refuser la « main tendue » du président par intérim, Abdelkader Bensalah. Qui avait appelé au « dialogue » le 6 juin dernier. « Nous sommes favorables au dialogue, mais pas avec Bensallah. Il faut qu’il soit mené par des personnalités honnêtes et crédibles », lui a rétorqué une étudiante en droit. Tandis que d’autres scandaient : « Nous continuerons à descendre dans la rue jusqu’au départ de tous les voleurs ».

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Les étudiants ne semblent donc pas prêts, en Algérie, à offrir un blanc-seing au pouvoir de transition. Pour eux, l’organisation rapide d’une élection présidentielle, telle que souhaitée par celui-ci, signifierait purement et simplement la pérennisation du système. La question qu’il convient de se poser, à présent, est de savoir qui du peuple ou du régime lâchera du lest en premier. Dans une interview à Jeune Afrique, Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’Union africaine (UA), affirmait il y a quelques jours : « La volonté du changement exprimée par le peuple est évidente, mais il faut éviter le chaos. » En travaillant de concert, pour trouver un compromis, selon lui.

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