Chrétiens d’orient et musulmans s’unissent contre Donald Trump

« Nous, chrétiens de par le monde, sommes concernés par Jérusalem, tout comme le sont nos frères musulmans. »

La chose est connue. Les chrétiens conservateurs, évangélistes, sont très influents au sein du Parti républicain aux États-Unis. La droite religieuse américaine est par exemple à l’origine du Jerusalem Embassy Act de 1995, qui prévoit le déplacement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv vers Jérusalem. Pour ces chrétiens, les prophéties bibliques sont perçues « comme des réalités à venir » et nombre d’entre eux sont des « sionistes chrétiens » qui militent pour un engagement encore plus intense avec l’Etat d’Israël.

Dans le monde arabe, la réalité est tout autre. Les chrétiens s’opposent majoritairement à la décision de Donald Trump. La contestation du monde musulman est souvent mise en avant, mais comme le déclare le patriarche maronite Béchara Raï, « nous, chrétiens de par le monde, sommes concernés par Jérusalem, tout comme le sont nos frères musulmans. » Un propos qui fait écho, en s’opposant, à celui de Laurie Cardoza-Moore, une activiste chrétienne américaine pro-israélienne, qui avait déclaré : « Nous, chrétiens américains, saluons l’obéissance de Donald Trump à la Parole de Dieu à propos de Jérusalem. » Ambiance.

Mauvais signe

Le 6 décembre dernier, les patriarches et évêques des églises de Jérusalem ont envoyé une lettre au président des États-Unis, pour le mettre en garde contre les conséquences désastreuses de sa déclaration. A ce titre, les 13 chefs des Eglises catholiques, évangéliques, orthodoxes et apostoliques de la ville sainte, ont lancé un « conseil et un appel solennels aux Etats-Unis, afin qu’ils continuent de reconnaitre l’actuel statut international de Jérusalem ».

« Tout changement soudain causerait des dommages irréparables » selon ces derniers. Convaincus « qu’avec le soutien important de [leurs] amis, Israéliens et Palestiniens peuvent travailler à la négociation d’une paix juste et durable pour tous ». Vœu pieux ou croyance fondée ? Pour eux, l’appel de Donald Trump est en tout cas un mauvais signe envoyé à l’approche de Noël. Et ils ne souhaitent pas que le président américain prive Jérusalem d’une paix nécessaire.

« Statut spécial »

Dimanche dernier, une délégation de responsables chrétiens a rencontré le roi de Jordanie, Abdallah II, protecteur officiel de la minorité chrétienne de son pays. Ce dernier – tuteur des lieux saints à Jérusalem – a précisé une nouvelle fois son opposition à la reconnaissance par les Etats-Unis de Jérusalem comme capitale d’Israël. Tout comme les délégués, qui ont « souligné que cette décision est illégale, qu’elle sape la paix et qu’elle est contraire aux enseignements chrétiens ».

Lire aussi : En Jordanie, des chrétiens manifestent pour « défendre » Jérusalem

Quelques jours avant, Béchara Raï avait invité les représentants musulmans et chrétiens à se rassembler contre la décision de Donald Trump. Le responsable catholique affirmant que « la plupart d’entre nous ont exprimé leur refus de cette décision, de manière individuelle ou dans le cadre de leur communauté. Aujourd’hui, nous nous réunissons afin d’exprimer, d’une seule voix, notre refus. Nous réclamons, tout comme l’a fait l’Organisation de la coopération islamique hier lors de son sommet, l’application des lois internationales votées depuis 1947, surtout la résolution 181 du 29 novembre 1947, en vertu de laquelle Jérusalem a un statut spécial. »

Elan « positif »

Côté égyptien, le pape copte Tawadros II a décliné l’offre du Vice-président américain, Mike Pence, qui souhaitait rencontrer le responsable de la principale Eglise égyptienne. Quant au maire musulman de la ville de Nazareth, en Israël, Ali Salem, il voulait tout simplement limiter les célébrations de Noël. Avant de revenir toutefois sur son engagement. « Nazareth est la ville de la paix et de la fraternité entre les religions et les nations, et il n’y a rien de tel que l’esprit de la fête et l’expérience partagés pour le prouver » a-t-il finalement déclaré.

La décision de Donald Trump, sur Jérusalem, a beau avoir été prise, comme bien d’autres, en dépit de nombreux avertissements, le fait est qu’elle a rapproché les communautés chrétiennes et musulmanes. Un élan « positif », pour Antoine Courban, professeur de médecine à l’université Saint-Joseph de Beyrouth. Qui estime que « la question de Jérusalem les réunit car elle abrite des lieux saints pour les deux religions. » La religion qui réunit plus qu’elle ne divise, on commençait à ne plus y croire.

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