Khalil Klai:  » On ne peut pas encore parler d’élections en 2021 en Libye »

Journaliste spécialiste du dossier libyen, Khalil Klai est directeur du bureau de Tunis de la chaîne Alaraby et correspondant de l’agence Anadolu à Tripoli. Il est producteur et animateur d’émissions politiques pour plusieurs chaînes de télévision tunisiennes. Il répond aux questions de la rédaction sur la situation politique, économique et sécuritaire en Libye.

  1. Le Premier ministre libyen Abdel Hamid Dbeibah et son gouvernement d’union nationale, qui doivent gérer la transition jusqu’aux élections prévues le 24 décembre prochain, ont prêté serment ce lundi 15 mars. Quels sont les nouveaux enjeux qui attendent le nouveau gouvernement libyen ?

 

Les enjeux qui attendent le nouveau gouvernement sont considérables, compte tenu de la pression relative à l’importance de la période stratégique. La tenue d’élections et la stabilité politique en Libye, sont tributaires de la réussite de ce gouvernement. Mais le plus grand défi reste celui de trouver des solutions consensuelles pour faire participer toutes les tranches politiques, tribales, militaires à cette nouvelle mosaïque politique, en vue de réaliser un équilibre politique, favorisant la stabilité. Et c’est là toute la difficulté, compte tenu des risques d’exclusion de certaines parties.

 

Par ailleurs, malgré le retour d’activité des sites pétrolier, contribuant ainsi à améliorer la situation économique, l’autre défi majeur qui attend ce gouvernement, reste celui de faire face aux problèmes socio économiques avec l’urgence d’instaurer des réformes sectorielles efficaces permettant de réduire le taux d’inflation et la dépréciation du dinar libyen par rapport à l’euro et au dollar américain, et de réduire le taux de pauvreté, notamment dans les régions marginalisées, où les conditions de vie sont très difficiles.

 

Mais cela ne serait pas possible sans l’accord des parties et leur entente. Il est important que tout le monde prenne conscience de l’importance de ce processus électoral , et de ce qu’il représente pour la sortie de crise du pays. Toutefois, à mon humble avis, ce ne sont pas tous les acteurs qui font partie de la chaîne et qui sont convaincus par le gouvernement de Dbeibah.

 

Le nouveau gouvernement devra aussi capturer les milices, déminer les mines, récupérer les armes, faire sortirr la présence militaire étrangère en Libye. On se demande aussi quel sera le rôle joué par le maréchal Haftar et quelle relation aura-t-il avec ce nouveau gouvernement ?

 

On se demande également quel sera le sort des cimetières collectifs, et si les responsables seront jugés, surtout que Haftar est l’accusé principal dans cette affaire. La justice transitionnelle constitue un énorme challenge pour ce gouvernement et peut être même pour celui d’après.

 

  1. Comment commentez-vous la situation militaire et sécuritaire en Libye ?

 

La situation est relativement et temporairement stable sur le plan sécuritaire. En revanche, il faut les mercenaires de Wagner, Janjawid  sont toujours présents  à Sirte, Al Jufrah, et dans d’autres régions encore.

 

La présence de la compagnie Wagner n’est pas temporaire, elle est même croissante et peut être durable quand on voit le nombre d’avions venus de Syrie et qui se sont installés dans la base d’Al Jufrah.

 

  1. Quels sont les rôles joués par les pays influents dans la région, sur l’échiquier politique libyen ?

Il est encore tôt pour parler du rôle joué par les pays étrangers. Pour l’heure les réactions officielles sont politiques et diplomatiques, des messages d’encouragements.

On pourra obtenir des réponses à cette question, une fois le processus électoral en route, et une fois que le gouvernement actuel déclenchera les mécanismes nécessaires pour le démarrage du processus électoral, avec la tenue d’élections.

 

  1. Peut-on parler de stabilité, même partielle en Libye ?

On peut parler d’une stabilité « relative » en Libye, il s’agit d’une stabilité conditionnelle, tributaire du cessez le feu, en vigueur depuis l’été dernier. Tant qu’il n y pas de confrontations directes en cours, on peut donc parler de stabilité malgré quelques accrochages qui ont lieu de temps à autre.

 

  1. On parle d’élections en décembre 2021, est ce possible selon vous ?

 

La tenue d’élections en 2021 reste tributaire de l’équilibre politique, et l’accord entre les différentes parties. A priori, la coalition de Maréchal Haftar, ne semble pas prête de tendre la main au dialogue ni en faveur des élections et ce, malgré des discours en ce sens. On a pu le constater avec l’offensive sur la capitale Tripoli, mise en échec.

 

Partages