Le président de la République et le ministre des Affaires étrangères se sont succédés pour dénoncer vivement la situation humanitaire.
La France s’est-elle décidée à (ré)agir ? Sur Twitter, le ministère des Affaires étrangères indiquait, mardi, que le pays « condamne les bombardements dans la Ghouta orientale et appelle l’ensemble de ses partenaires au Conseil de sécurité de l’ONU à prendre leurs responsabilités pour parvenir à une trêve humanitaire ». Le même jour, le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, se trouvait d’ailleurs à l’Assemblée nationale pour la séance des questions au gouvernement. Et n’a pu éviter le sujet. Interrogé par la députée La République en marche (LREM) Monica Michel, sur la situation dans la banlieue est de Damas, celui-ci d’expliquer que « le processus politique est bloqué [et] la guerre civile se poursuit ». Et selon lui, « le pire est devant nous : s’il n’y a pas d’éléments nouveaux, nous allons vers un cataclysme humanitaire ».
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Hier, c’est le président de la République, Emmanuel Macron, qui se fendait de quelques mots sur le réseau social : « Condamnation claire et vigoureuse de la France à l’encontre du régime syrien qui s’en prend aux populations civiles. Nous demandons à l’ONU l’adoption immédiate d’une trêve dans la Ghouta afin de protéger les civils et de créer des accès humanitaires. » La difficulté pour les ONG d’accéder à la zone de combats est effectivement régulièrement pointée du doigt. Lundi, le coordinateur régional des Nations unies (ONU) pour la crise syrienne, Panos Moumtzis, avait alerté sur « l’accès général à la Ghouta orientale [qui] demeure extrêmement difficile ; aucun convoi n’a été effectué en décembre ni en janvier. » Mardi, c’était au tour de l’ONG international Care d’indiquer que « l’apport d’aide humanitaire [était] suspendu à cause des bombardements incessants. »
« Position intenable »
Depuis dimanche, plus de 300 civils – dont 70 enfants – ont ainsi été tués par les frappes du régime syrien. Ce dernier cherche désespérément à s’emparer du fief rebelle de la Ghouta orientale, le dernier en Syrie, d’où sont tirées des roquettes qui visent la capitale syrienne. Cela fait plusieurs semaines, à présent, que la quasi totalité des acteurs ou observateurs appelle à un cessez-le-feu dans cette zone, où sont retranchées près de 400 000 personnes. Hier, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a même évoqué devant le Conseil de sécurité un « enfer sur Terre » tout en implorant l’arrêt « immédiat des combats » dans la Ghouta. Et la semaine dernière, à Paris, Abdulrahman Almawwas, le vice-président des « casques blancs » de la défense civile syrienne, déclarait qu’ « il est temps de prendre des mesures concrètes plutôt que de se contenter de parler de ‘‘lignes rouges’’ ».
De quoi réveiller, sans doute, l’Hexagone, jugé jusque là sinon frileux, du moins attentiste, globalement, sur le dossier syrien. Marie Peltier, historienne spécialiste de la Syrie, expliquait il y a quelques jours au Monde arabe que « la France a aujourd’hui une position ambigüe vis-à-vis [du] régime » syrien, traduisant « une volonté à peine cachée de se tenir en retrait de ce conflit ». Une « position intenable, tant sur un plan éthique que sur un plan politique » selon elle, que Paris vient très légèrement de faire évoluer. Pas question, pour l’instant, de déloger Bachar al-Assad de Damas – il faudra sans doute compter avec lui dans un futur proche. Mais « la France estime indispensable que le Conseil de sécurité (de l’ONU) puisse permettre dès à présent une trêve humanitaire qui évite les risques les plus lourds » affirmait Jean-Yves Le Drian mardi dernier. Un projet de résolution, en ce sens, de la Suède et du Koweït, devait d’ailleurs être étudié aujourd’hui.
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Etudiant en master de journalisme, Bertrand Faure se destine à la presse écrite. Passionné de relations internationales, il nourrit un tropisme particulier pour le Maghreb et la région MENA, où il a effectué de nombreux voyages.