Esclavage : Amnesty dénonce la politique à deux vitesses de la Mauritanie

L’ONG condamne le traitement subi par les militants anti-esclavage dans le pays malgré l’abolition de ce fléau en 1981.

La politique de Nouakchott en la matière peut en effet laisser perplexe puisque outre l’abolition, l’Etat a également érigé l’esclavage au rang de crime contre l’humanité en vertu d’une loi votée en août 2015. Un texte sensé sanctionné « les contrevenants » à des peines pouvant aller jusqu’à 20 ans d’emprisonnement, contre 5 à 10 ans auparavant.

Pourtant, dans les faits, près de 43 000 personnes en subissaient encore les conséquences en 2016, soit environ 1% de la population totale, souligne un rapport de l’organisation, relayé par VOA Afrique.

Et il est peu probable que le cru 2018 inverse sensiblement cette courbe, laisse entendre Alioune Tine, directeur d’Amnesty pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale : « Les lois n’ont pas été mises en oeuvre ni appliquées de manière adéquate. Ces dernières n’ont eu aucune incidence sur la vie des gens », peste ainsi l’intéressé.

Quant à François Patuel, chercheur pour l’Afrique de l’Ouest, il condamne sans ménagement le déni opéré par les autorités qui préfèrent « s’en prendre à ceux qui s’opposent au discours officiel ».

Mohamed Ould Abdel Aziz en ligne de mire 

Derrière le mot « autorités » siège en bonne place le président Mohamed Ould Abdel Aziz, réélu en 2014, dont la politique « judiciaire » fait la part belle à un arsenal de mesures répressives dissuasives. Et cela, à l’attention des militants dénonçant l’esclavage mais aussi les discriminations.

Concrètement, « plus de 168 défenseurs des droits humains ont été arrêtés arbitrairement et 17 d’entre eux, au moins, ont été torturés ou soumis à d’autres mauvais traitements ces cinq dernières années », ajoute Amnesty.

A titre d’exemple, 13 membres de l’IRA, une ONG luttant pour la résurgence du mouvement abolitionniste (non reconnue par l’exécutif), ont été condamnés par la cour criminelle de Nouakchott à des peines allant de trois à quinze ans de prison en août 2016.

Selon les juges, ces hommes et femmes s’étaient rendus coupables de violence envers les forces de l’ordre à l’occasion d’une manifestation de défense des Droits de l’homme organisée quelques semaines plus tôt dans la capitale mauritanienne.

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