Les deux diplomaties se retrouvent notamment sur la question iranienne, la bête noire des Saoudiens au Moyen-Orient.
« Meilleures que jamais ». Voilà comment Donald Trump a qualifié, hier, les relations entre les Etats-Unis et l’Arabie saoudite, après s’être entretenu avec le prince héritier du royaume, Mohamed ben Salman, en visite officielle à Washington. Le fils de l’actuel monarque, le roi Salman, qui pilote en sous-main les affaires saoudiennes – en attendant de monter sur le trône -, y a également rencontré plusieurs officiels et diplomates. Et, en écho aux propos du président américain, « MBS » a déclaré, de son côté, que les relations entre les deux pays étaient « historiques » et « profondément enracinées », et devaient même être renforcées.
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Cette visite intervient à un moment particulier ; le Moyen-Orient, « première poudrière du monde », connait un vif regain de tensions depuis plusieurs mois. Ceci, notamment, à cause de la lutte que se livrent Saoudiens et Iraniens pour la suprématie régionale. Au Liban, Téhéran est accusée de s’immiscer dans les affaires politiques grâce au parti chiite du Hezbollah ; au Yémen, les deux puissances s’affrontent indirectement, l’Arabie saoudite épaulant le gouvernement qui lutte contre les rebelles Houthis, soutenus par l’Iran. Ce qui explique la volonté de Riyad de vouloir renforcer ses accointances avec l’ex-gendarme américain.
« Paysage sécuritaire »
Mohamed ben Salman s’est d’ailleurs rendu au Pentagon, dans la journée de jeudi, afin de s’entretenir avec le secrétaire américain à la Défense, James Mattis. Là aussi, il a été question de coopération, à tous les niveaux, dont le commerce et le développement technologique entre les deux pays. Le prince héritier a rencontré les responsables de plusieurs entreprises de défense, comme Boeing, Raytheon – qui teste actuellement des systèmes de défense anti-drones -, Lockheed Martin – premier groupe mondial de défense et sécurité – et General Dynamics – spécialisé dans la conception et la fabrication d’avions militaires.
« Les relations stratégiques étroites entre les Etats-Unis et l’Arabie saoudite ont été vitales pour la sécurité et la prospérité des deux pays, ainsi que pour la paix et la stabilité régionales » explique effectivement Saad Alsubaie, spécialiste des questions de sécurité internationale et membre du Conseil national pour les relations américano-arabes basé à Washington. « Cette relation historique n’a jamais été aussi importante qu’aujourd’hui, principalement pour deux raisons étroitement liées : le changement dans le paysage sécuritaire complexe du Moyen-Orient et le changement au sein de l’Arabie saoudite. »
« Vision 2030 »
Sous-entendu : l’Iran n’est pas seulement une menace pour l’Arabie saoudite ou le Moyen-Orient, mais également pour les Etats-Unis. Qui, depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, ont clairement pris le contre-pied de la diplomatie pro-iranienne de Barack Obama. La preuve : Washington, qui soutient la coalition de pays arabes dirigée par Riyad au Yémen, souhaite lui apporter un milliard de dollars de financements, avec notamment des capacités de renseignement, de formation et de réapprovisionnement en vol. Un appui qui n’est pas du goût de tous, aux Etats-Unis, puisque des membres du Congrès s’y sont d’ores et déjà opposés.
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Sur la scène intérieure, l’Arabie saoudite connait depuis quelque temps de profondes transformations, comme le note Saad Alsubaie. « Le prince héritier souhaite rétablir la modération et éradiquer l’extrémisme, ainsi que réprimer la corruption », comme en témoigne la purge historique conduite en novembre dernier contre des influents du royaume. Le fils du roi Salman est également derrière l’ambitieuse réforme économique « Vision 2030 », qui vise à désengager le pays de sa dépendance à l’or noir. Et qui, pour l’instant, tarde légèrement à décoller ; Mohamed ben Salman l’a d’ailleurs rappelé, dans la capitale américaine : il s’attend à des relations commerciales resserrées avec les Américains.

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