Israël : fin de carrière pour Benjamin Nétanyahou ?

Ses affaires judiciaires pourraient faire vaciller les soutiens à droite du Premier ministre israélien.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, est-il victime d’une « chasse aux sorcières » comme il l’affirme ? Le procureur général d’Israël, Avichai Mandelblit, a fini par dresser un acte d’accusation à l’encontre du leader du Likoud (droite), jeudi, dans trois affaires de corruption, fraude et abus de confiance, après plusieurs mois de délibérations. Une « décision courageuse », selon le magistrat, qui assure qu’aucun motif politique n’a pesé dans la balance. Tandis que le principal intéressé – qui n’avait pas manqué de s’en prendre aux policiers et aux procureurs tout au long de l’enquête – affirme qu’il s’agit de « fausses accusations » établies à la suite d’une « enquête bâclée ». Dans une déclaration « provocante », rapporte l’agence de presse AP, Benjamin Nétanyahou a ainsi déclaré que le pays était témoin d’une « tentative de coup d’Etat ».

Ses affaires judiciaires avaient déjà empêché le Premier ministre israélien de former un gouvernement à deux reprises, cette année, après un enchaînement d’élections législatives sans précédent. Si bien qu’un troisième vote pourrait avoir lieu dans quelques mois. « Les graves accusations de corruption annoncées jeudi semblent avoir anéanti les espoirs déjà minces d’un gouvernement d’unité après les élections de septembre, ouvrant la voie à un nouveau vote en mars [prochain], le troisième en moins d’un an », précise l’AP. Vendredi, les commentateurs politiques israéliens se demandaient déjà si l’inculpation du Premier ministre, qui devrait sans doute « aiguiser » les ressentiments dans un système politique actuellement bloqué, ne serait pas de nature à faire vaciller les soutiens et la loyauté de ses alliés de droite, dont il a besoin pour diriger le pays.

« Démissionner immédiatement »

Si certains, comme le journaliste Sima Kadmon, qui estime que Nétanyahou « se tiendra debout et regardera le pays brûler », assurent que le Premier ministre jouera sa carte à fond, son parti, le Likoud, apparaît bien morcelé et rien n’indique qu’il pourra de nouveau se placer sur l’échiquier politique israélien. « Nous savons qu’il y a des membres de la Knesset [le Parlement de l’Etat hébreu, ndlr] qui disent que Nétanyahou est devenu un handicap et qu’il devrait peut-être démissionner, mais ils ont toujours peur de s’opposer à lui ouvertement », a ainsi déclaré Eytan Gilboa, professeur de sciences politiques à l’Université Bar Ilan. Gideon Saar, un haut responsable du Likoud, a quant à lui estimé qu’une élection primaire devrait avoir lieu avant tout scrutin futur – et qu’il serait candidat -, tandis que le Jérusalem Post, un journal de droite, appelait à la démission de M. Nétanyahou dans un éditorial.

Son principal opposant, Benny Gantz – qui, arrivé en première position lors du scrutin de septembre (25,95 % des voix), a lui aussi échoué, mercredi dernier, à former un gouvernement -, a lui aussi demandé à l’ancien chef du gouvernement de « démissionner immédiatement ». Citant, à l’appui de sa requête, un arrêt de la Cour suprême précisant que les ministre inculpés devaient abandonner leur fonction. « Nétanyahou a privilégié ses intérêts personnels […] et doit se rappeler que nous sommes encore en démocratie et que la majorité du peuple a voté pour une politique différente de la sienne », a par ailleurs ajouté le leader du parti centriste Bleu Blanc, après avoir annoncé au président de la République, Réouven Rivlin, son incapacité à désigner une équipe gouvernementale. Ce qui nécessite, pour rappel, d’avoir une coalition majoritaire de 61 sièges à la Knesset (sur 120).

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