Mohamed Salah, « symbole du soft power de l’Egypte »

Le footballeur égyptien va disputer, samedi, la finale de la Ligue des Champions avec Liverpool contre le Real Madrid.

Le sport, au même titre que la culture, a toujours eu une place prépondérante dans les relations internationales, comme instrument de soft power – cette fameuse manière de faire de la politique sans avoir l’air d’y toucher. Et le football, sport le plus populaire au monde, sans doute plus que toute autre discipline. Le ballon rond, indéniablement, est un moyen d’influence et de rayonnement, sur le plan national comme international. Ce qu’a très bien compris l’Egypte.

A quelques semaines du Mondial, qui aura lieu du 14 juin au 15 juillet en Russie, le football fait ainsi de plus en plus parler de lui au pays des pharaons. Un homme, notamment, est à l’origine de cette forte médiatisation : Mohamed Salah, joueur star du club de Liverpool (Angleterre), élu meilleur joueur de Premier League cette saison – ce qui n’est pas une mince affaire si l’on considère qu’il s’agit du meilleur championnat européen -, qui voit son effigie s’arracher un peu partout dans le pays.

« Le nom de l’Egypte »

Des hommes politiques en passant par les publicitaires, tous ont senti le « filon » Mohamed Salah, depuis que celui-ci épate le Vieux Continent – voire la planète – avec ses accélérations balle au pied et ses ribambelles de buts. Mais également ses performances en équipe nationale ; ne dit-on pas que le prodige de Liverpool, qui jouera samedi prochain sa première finale de Ligue des Champions contre le Real Madrid, a qualifié à lui tout seul l’Egypte pour le Mondial russe ?

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Ahmed Abou Zeid, déclarait ainsi il y a quelques semaines que le joueur représentait un « symbole du soft power de l’Egypte », tandis que le président, Abdel Fattah al-Sissi, peu rancunier, se disait « fier » de Mohamed Salah « et de tout Egyptien qui porte haut le nom de l’Egypte ». Pour mémoire, le joueur avait été plébiscité par pas moins d’un million de personnes à la dernière élection présidentielle – alors qu’il ne s’était pas présenté.

Passe d’armes

C’est que l’homme fort de l’Egypte n’avait guère le choix. Pour Pascal Boniface, directeur de l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), le fait qu’ « un sportif de ce niveau perce le mur médiatique et devienne un visage mondial rejaillit forcément […] sur son pays d’origine ». Et difficile, lorsque l’on se sait plus ou moins illégitime à son poste, de louper une occasion de se rapprocher du « peuple » ; pour le géopolitologue, Mohamed Salah a effectivement eu un effet important sur « l’estime de soi nationale ».

Celui-ci d’estimer cependant que la portée de ces tentatives de récupération politique à l’international sont « trop visibles » et bien trop proches des « anciens moyens de propagande ». Quant à l’utilisation à outrance de l’image du joueur, elle peut connaitre quelques couacs. Il y a quelques semaines, une petite passe d’armes a eu lieu entre Mohamed Salah et la Fédération égyptienne de football, le premier reprochant à la seconde d’avoir apposé son portrait sur l’avion de la sélection, à côté du logo de l’opérateur mobile « We ». Le concurrent de Vodafone, sponsor personnel du joueur…

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