En Irak, une aide humanitaire en manque de fonds

Entre la protection des personnes vulnérables, la santé, l’eau, la sécurité alimentaire et celle du logement, les besoins ne manquent pas…

50 millions d’euros. C’est l’aide qu’a promis d’apporter l’Union européenne (UE) à l’Irak, vendredi dernier, alors que le pays peine toujours à se reconstruire, près de deux ans après l’annonce de la chute de l’organisation Etat islamique (EI). Christos Stylianides, le commissaire européen chargé de l’aide humanitaire, a annoncé depuis Mossoul (nord), où il a notamment visité un centre de l’UNICEF, que cette aide serait partagée entre une enveloppe de 20 millions d’euros, destinée à la reconstruction proprement dite – patrimoine, emplois… -, et une autre de 30 millions d’euros, dévolue uniquement à l’aide humanitaire.

Fin 2018, d’après le Bureau des Nations unies (ONU) pour les affaires humanitaires (OCHA), sur les 37 millions d’individus que compte l’Irak, 6,7 millions d’entre eux avaient besoin d’une assistance. Dans les régions frontalières de la Syrie, surtout, comme Ninive (2,2 millions) et Anbar (1,4 million), alors que depuis plusieurs mois, le « califat » de Daech (acronyme arabe de l’EI) se résume à quelques kilomètres carrés de terre syrienne à l’est de l’Euphrate. Un territoire en passe d’être complètement repris par les Forces démocratiques syriennes (FDS) d’ailleurs.

« Réconciliation communautaire »

Ce qui ne signifie pas, loin de là, que les Irakiens – pas plus que les Syriens – peuvent à présent s’attendre à vivre sereinement. « Bien que le gros des batailles soit maintenant passé, les besoins restent très importants en Irak, qui demeure notre deuxième plus grosse opération humanitaire à travers le monde », faisait ainsi savoir Peter Maurer, le patron de la Croix Rouge (CICR), début février. Ce dernier soulignant notamment la situation des personnes déplacées en interne (1,8 million), dont « le processus de retour est complexe et prendra du temps ».

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Même son de cloche, plus ou moins, du côté de l’OCHA, qui précise dans son plan d’intervention pour 2019 : « Le contexte humanitaire en Irak est entré dans une nouvelle phase. Bien que le pays soit actuellement dans une situation d’après-conflit, il reste des dynamiques imprévisibles un peu partout, qui peuvent avoir un impact sur le travail humanitaire. Parallèlement, de nouvelles sources d’instabilité apparaissent également, liées à l’augmentation de la pauvreté [mais également aux] retards dans la réconciliation communautaire ». Les rapports entre sunnites et chiites, surtout, connaissant quelques tensions.

« Sexe de subsistance »

Sur une liste de besoins qui englobe ceux de l’éducation et du travail, notamment, l’ONU en a pointé quelques uns de premier ordre, à prendre en charge immédiatement : la protection, la santé, l’eau, la sécurité alimentaire et celle du logement. Dans certaines grandes villes du pays, comme Mossoul par exemple, la traque des anciens membres de l’EI, par les forces de police ou l’armée, peut entraîner certains abus, dans les « campements informels » notamment. Tout aussi inquiétante, « la violence basée sur le genre continue d’être perpétrée, en particulier contre les femmes et les filles », dont certaines, face à « l’insuffisance des ressources économiques », peuvent avoir recours au « sexe de subsistance », note l’OCHA.

En matière d’aide alimentaire, les besoins restent également importants pour 2,5 millions d’Irakiens – dont beaucoup de « déplacés vulnérables » qui vivent dans des camps. Alors qu’en avril 2018, plus de 15 000 familles avaient été touchées par les réductions budgétaires impactant l’aide alimentaire dans les camps, « en 2019, [celle-ci] doit être conçue sur le long terme », grâce, notamment, à « la remise en l’état de l’agriculture et de l’irrigation dont les infrastructures ont été endommagées ». Une gageure, alors que l’Irak peine toujours à trouver une stabilité gouvernementale et que l’aide internationale peine à arriver. Sur les 700 millions de dollars requis, selon l’OCHA, moins de 10 % ont déjà été fournis…

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