Tunisie : « La liste des paradis fiscaux était plutôt une décision politique »

Retirée de la « liste noire » de Bruxelles, Tunis demeure tout de même sur une « liste grise » et doit respecter certains engagements en matière fiscale.

Le nom de la Tunisie a finalement été retiré, mardi dernier, de la liste noire des paradis fiscaux de l’Union européenne (UE). Une décision prise à la suite d’une session du Conseil des affaires économiques et financières, qui revient donc sur la décision initiale, prise en décembre dernier, d’inscrire le pays du nord de l’Afrique parmi les pays et territoires non coopératifs en matière fiscales.

Avec la Tunisie, la Barbade, la République de Corée, les Émirats arabes unis, la Grenade, la région administrative spéciale de Macao, la Mongolie et le Panama « se sont engagés, à un niveau politique élevé, à répondre aux préoccupations exprimées par l’UE », a rapporté un communiqué publié par Bruxelles. « Le 23 janvier 2018, le Conseil a convenu qu’une désinscription de la liste se justifiait à la lumière de l’évaluation effectuée par des experts des engagements pris par ces pays et territoires en vue de remédier aux manquements recensés par l’UE ».

« Décision politique »

Il est à noter que la Tunisie avait présenté des mesures et engagements pour répondre aux préoccupations de l’UE concernant ses régimes fiscaux applicables aux exportations et aux services financiers. Joint par Le Monde Arabe, l’expert Nader Haddad explique que « la liste des paradis fiscaux était plutôt une décision politique » ; « cela n’a rien à voir avec l’évasion fiscale lorsqu’on voit des pays européens qui ne figurent pas dans cette liste comme l’Irlande et le Luxembourg en dépit des avantages fiscaux très séduisantes qu’ils offrent pour les dépositaires étrangers et les investisseurs ».

Ce dernier de préciser également qu’ « aucune économie des pays de cette liste n’a été directement touchée par cette décision, car cela n’a aucun impact sur les dettes extérieures ni sur les investissements directs ». Selon lui, la Tunisie a été retirée de la liste des pays non coopératifs en matière fiscale suite à un engagement qui a été pris par le gouvernement Tunisien pour la mise en place dans un système de reporting et des échanges des données bancaires avec l’UE. « Cette dernière décision de retirer la Tunisie n’aura un impact que sur la relation bilatérale euro-tunisienne » précise-t-il.

« Liste grise »

Pour rappel, le 5 décembre dernier, le Conseil européen a annoncé sa « liste noire » de 17 pays, après avoir examiné les juridictions relatives à la fiscalité et aux réformes fiscales, et exigé trois principaux critères : l’équité fiscale, le respect des normes de transparence et la mise en place de mesures anti-profit recommandées par l’OCDE, et connues sous l’appellation BEPS (Base Erosion and Profit Shifting). Pour le gouvernement tunisien, « la Tunisie n’avait rien à faire sur la liste noire », avait expliqué le secrétaire d’Etat au Commerce extérieur, Hichem Ben Ahmed, lors d’une interview accordée à RFI.

Dans un entretien accordé au quotidien tunisien La Presse, le commissaire européen aux affaires économiques, Pierre Moscovici, est quant à lui revenu sur cette « affaire » et a assuré que la Tunisie, « ce pays ami de l’Union », n’a pas sa place sur cette liste noire. Mais Tunis n’est pas pour autant tirée d’affaire : elle a été déplacée d’une « liste noire » à une « liste grise », soit de « pays et juridictions non-coopératifs » à « pays et juridictions coopératifs qui doivent respecter leurs engagements ».

Partages