Les Nations unies ont estimé à 4,3 milliards de dollars les besoins humanitaires de ce pays en guerre depuis près d’une décennie.
Lors d’une conférence organisée lundi, les Nations unies ont demandé 4,3 milliards de dollars pour soulager les souffrances de millions de personnes au Yémen, où une guerre civile de huit ans a engendré l’une des pires crises humanitaires au monde.
Plus de 21 millions de personnes au Yémen, soit les deux tiers de la population du pays, ont besoin d’aide et de protection, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), qui estime que les besoins humanitaires au Yémen sont « choquants ». Parmi les personnes dans le besoin, plus de 17 millions sont considérées comme particulièrement vulnérables.
« Terrible catastrophe »
La réunion de lundi était organisée conjointement par la Suède, la Suisse et l’ONU au Palais des Nations à Genève. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, devait s’adresser aux donateurs pour leur parler de la situation humanitaire désastreuse dans le pays le plus pauvre du monde arabe.
Dans une première annonce lundi, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a déclaré que son pays allait fournir 120 millions d’euros (127 millions de dollars). « Cette terrible catastrophe humanitaire est une situation sur laquelle le monde a, à plusieurs reprises et bien trop souvent, presque fermé les yeux », a-t-elle déclaré aux journalistes à Genève.
L’appel de 4,3 milliards de dollars pour 2023 représente presque le double des 2,2 milliards de dollars que l’ONU a reçus en 2022 pour financer son programme humanitaire au Yémen. L’ONU avait demandé 4,27 milliards de dollars pour 2022.
La conférence de lundi intervient alors que l’économie mondiale reste ébranlée par l’invasion russe de l’Ukraine qui dure depuis un an. Les taux d’inflation ont bondi au cours de l’année écoulée dans le monde entier, obligeant de nombreux gouvernements à se concentrer sur l’élévation des besoins de leur propre population.
Guerre régionale
Le conflit au Yémen a commencé en 2014, lorsque les rebelles Houthis, soutenus par l’Iran, ont pris la capitale, Sanaa, et une grande partie du nord du pays. Une coalition dirigée par l’Arabie saoudite et soutenue par les États-Unis est intervenue quelques mois plus tard, début 2015, pour tenter de déloger les rebelles et de rétablir au pouvoir le gouvernement reconnu par la communauté internationale.
Ces dernières années, le conflit est devenu une guerre régionale par procuration qui a tué plus de 150 000 personnes, dont plus de 14 500 civils. La guerre a également créé une crise humanitaire épouvantable, laissant des millions de personnes souffrir de pénuries de nourriture et de soins médicaux et poussant le pays au bord de la famine.
La conférence se déroule alors que les parties belligérantes continuent d’observer un cessez-le-feu informel et fragile. Des efforts sont en cours pour déclarer une nouvelle trêve après que les parties n’aient pas réussi à renouveler une trêve négociée par les Nations unies en octobre.
La trêve, qui est entrée en vigueur en avril, a apporté un certain soulagement aux Yéménites, en particulier dans les zones contrôlées par les Houthis. Elle a permis la reprise du trafic commercial à l’aéroport de Sanaa et au port maritime de Hodeida.
Changement climatique
Toutefois, en raison notamment de la division territoriale – la moitié du Yémen environ étant sous le contrôle des Houthis et l’autre moitié sous celui du gouvernement – le pays est hanté par une crise économique. Selon le groupe d’experts des Nations unies chargé d’enquêter sur le conflit au Yémen, il existe un double système monétaire, un double taux de change, des restrictions sur les importations et une double imposition des marchandises. L’inflation annuelle a atteint 45 % et les prix des denrées alimentaires ont bondi de 58 %, selon le rapport du groupe d’experts.
Les Houthis ont également attaqué des installations pétrolières dans les zones contrôlées par le gouvernement, ce qui a entraîné l’interruption des exportations de pétrole, qui constituent une source de financement importante pour le gouvernement.
Le changement climatique a ajouté aux souffrances. Le Yémen, situé à l’angle sud-ouest de la péninsule arabique, est « en première ligne » de la crise climatique mondiale, car les catastrophes naturelles, notamment les inondations et l’aridité, menacent les vies, a indiqué l’OCHA.
En 2022, le Yémen a souffert d’une grave sécheresse, de fortes pluies et d’inondations qui ont touché plus de 517 000 personnes et endommagé les infrastructures publiques et civiles de nombreuses provinces entre juillet et septembre de l’année dernière, selon l’OCHA.
Crédits photo : Le palais des Nations unies à Genève, en Suisse (Wikimedia Commons).