Au Maroc, le développement humain veut désormais passer par la petite enfance

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27.09.2019

C’est une évolution qui se veut un « changement de paradigme » pour le Royaume Chérifien, selon ses promoteurs réunis en conclave à Skhirate – Banlieue de Rabat- pour les assises de l’Initiative nationale pour le Développement humain (INDH) jeudi 19 septembre dernier. En effet, à l’heure où ce vaste programme voulu par le roi Mohammed VI et piloté par le ministère de l’intérieur souffle ses 14 bougies, le moment semblait venu d’opérer un virage stratégique afin d’agir très en amont dans le parcours de vie des Marocains, en plaçant la petite enfance au cœur de cette nouvelle étape de l’INDH.

Depuis 2005, l’INDH qui vise la « réduction de la pauvreté, de la précarité et l’exclusion sociale » peut mettre à son actif de nombreuses réalisations dans le développement des capacités, l’amélioration de l’accès aux infrastructures de base et aux équipements culturels et sportifs, pour un budget dépassant les dix milliards d’Euros. En ligne de mire : la réduction des inégalités, l’une des corollaires de la forte croissance marocaine des vingt dernières années. Cette période a certes vu l’émergence d’une classe moyenne et la diminution de moitié du taux de chômage, mais a également vu l’augmentation des disparités entre les riches et les pauvres, ainsi que l’accroissement des inégalités territoriales et spatiales.

Et c’est précisément sur le plan de l’égalité des chances que cette nouvelle étape de la stratégie de développement humain au Maroc veut agir, en choisissant de cibler la petite enfance. L’objectif ? la création de 10 000 unités de préscolaire, la réhabilitation de 5 000, pour une capacité d’accueil de 300 000 enfants âgés de 3 à 5 ans. Pour cela, une enveloppe de 230 millions d’euros a été mobilisée, et un dispositif de veille mis en place par le ministère de l’intérieur.

À cet égard, un certain nombre d’experts questionnent le choix de confier à nouveau le pilotage de ce segment de l’INDH par le ministère de l’intérieur et non celui de l’éducation nationale. Une critique balayée par les responsables du programme, dont le Wali Mohammed Dardouri, qui affirme que son département dispose du maillage territorial le plus étendu, qui lui permet notamment de « déployer le dispositif dans les zones rurales reculées ». De surcroît, toujours selon la même source, le programme visant la petite enfance a vocation à être transféré au ministère de l’éducation nationale après une période de deux ans.

Au-delà de ces éléments, il y a dans cette nouvelle phase de l’INDH au Maroc un enjeu crucial qui se joue, le pays aspirant à modifier son modèle de développement afin de le rendre plus inclusif. Mohammed VI devrait à cet effet installer dans les mois à venir une commission ad hoc chargée d’élaborer un nouveau modèle de développement. Le sujet de la petite enfance, crucial pour éviter d’avoir à déployer de couteux dispositifs curatifs, devrait ainsi occuper une place centrale dans les débats, sachant que 15 % des enfants marocains accusent un retard de croissance.

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