L’Etat islamique tente de se remettre en selle

Lundi 27 janvier, pour appuyer ces velléités d’un retour en force, Daech a menacé nommément les juifs dans un message audio.

Les tensions entre les Etats-Unis et l’Iran pourraient-elles offrir au groupe Etat islamique l’occasion de revenir hanter l’Irak et la Syrie ? Alors que le « califat » autoproclamé de Daech (acronyme arabe de l’Etat islamique) semblait largement vaincu, l’an dernier, avec la perte de son territoire, l’assassinat de son fondateur, Abou Bakr al-Baghdadi, par les Etats-Unis et une répression sans précédent de sa machine de propagande sur les réseaux sociaux, la question mérite d’être posée. Notamment parce que le différent américano-iranien a entrainé une remis en question de la présence de l’armée américaine sur le sol irakien.

« Les troupes américaines ont dû interrompre leurs opérations contre l’Etat islamique pendant près de deux semaines en raison de ces tensions. De l’autre côté, les miliciens irakiens soutenus par l’Iran, qui se concentraient autrefois sur la lutte contre les militants de Daech, ont détourné leur attention vers l’expulsion des troupes américaines du Moyen-Orient », explique l’agence américaine Associated Press (AP). Dans le même temps, renseigne-t-elle, « les cellules dormantes du groupe ont intensifié les embuscades en Irak et en Syrie au cours des dernières semaines, tuant et blessant des dizaines de leurs opposants. »

Attaques intensifiées

Selon plusieurs experts cités par AP, un retour de Daech s’avère désormais envisageable, alors que le groupe extrémiste se cantonne depuis l’année dernière à quelques campagnes de guérilla. Mais « les militants et les résidents affirment que les attaques se sont intensifiées depuis que les Etats-Unis ont tué le général iranien Ghassem Soleimani » dans la nuit du 2 au 3 janvier, lors d’une attaque de drone perpétrée à côté de l’aéroport de Bagdad. Toutefois, l’agence précise que cette hausse n’est pas forcément liée aux répercussions qui ont suivi l’assassinat de Soleimani : « Il est possible que certaines des attaques aient été planifiées avant », affirme-t-elle.

Mervan Kamishlo, un porte-parole de la force syrienne soutenue par Washington et dirigée par les Kurdes, a ainsi déclaré que l’intensification des attaques de l’EI avait commencé un peu plus tôt, depuis octobre, lorsque la Turquie a commencé une opération militaire contre les combattants kurdes dans le nord de la Syrie.

Abou Bakr al-Baghdadi, ancien chef de l'Etat islamique, tué par les Américains fin octobre 2019. Photo AP.

Le 5 janvier, le parlement irakien a demandé l’expulsion des 5 200 soldats américains présents dans le pays depuis 2014 pour une mission d’entraînement des forces irakiennes et d’assistance dans la lutte contre Daech. La coalition dirigée par les Etats-Unis avait alors suspendu cette lutte pour se concentrer sur la protection de ses troupes et de ses bases. Elle a déclaré la semaine dernière qu’elle avait repris ces opérations après une interruption de 10 jours. « Cette tension va certainement aider l’Etat islamique, car toutes les forces qui le combattent s’occupent d’autre chose », estime un chercheur syrien cité par AP.

« Combattre les juifs »

« Le jour où le conflit américano-iranien a commencé, Daech a commencé à intensifier ses attaques », abonde Rami Abourrahman, qui dirige l’Observatoire syrien des droits de l’Homme, basé en Grande-Bretagne. Le 14 janvier, le groupe terroriste a lancé une attaque transfrontalière de la Syrie vers l’Irak, tuant un officier irakien. Le jour d’après, les combattants djihadistes ont attaqué un groupe armé irakien dans la région de Salaheddine (Centre, entre Bagdad et Mossoul), tuant deux soldats et en blessant cinq autres. Deux jours plus tard, un major des services de renseignement irakiens était tué dans un attentat à la voiture piégée au nord de la capitale.

Lundi 27 janvier, pour appuyer ces velléités d’un retour en force, l’Etat islamique a menacé nommément les juifs, dans un message audio, où il a affirmé vouloir lancer une « nouvelle phase » de son « djihad » en ciblant spécifiquement Israël. Un appel lancé alors que Donald Trump doit dévoiler ce jour son « plan du siècle » pour la sauvegarde du Moyen-Orient, qui promet de faire la part belle aux intérêts de l’Etat hébreu au détriment de ceux des Palestiniens. Le nouveau chef de l’Etat islamique, Abou Ibrahim al-Hachemi al-Qourachi, est « déterminé » à entamer une « nouvelle phase qui n’est autre que de combattre les juifs et de rendre ce qu’ils ont volé aux musulmans », a indiqué le porte-parole de Daech, Abou Hamza al-Qourachi.

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