Soudan du Sud : la famine pourrait progresser début 2020

« Il faut que l’accord de paix de septembre 2018 soit appliqué et que l’aide soit renforcée », exhorte une organisation américaine.

Selon les perspectives dressées par FEWS NET (Famine Early Warning Systems Network), le Soudan du Sud restera confronté à des risques de famine élevés, l’an prochain. Ceci en dépit d’une sécurité alimentaire qui a retrouvé quelques couleurs courant 2019. « La crise (phase 3 de l’IPC [le « cadre intégré de classification de l’aide alimentaire », largement admis par la communauté internationale, ndlr]) ou des résultats moins bons restent généralisés pendant la période de récolte, malgré une amélioration relative de la situation de la sécurité alimentaire par rapport au pic de la période maigre de 2019. » 

« Conflit prolongé »

Ainsi, en octobre dernier, près d’un million de personnes (944 185) ont reçu une aide alimentaire, dont l’amplification reste nécessaire, selon le communiqué de l’organisme – créé en 1985 par l’Agence américaine pour le développement international (USAID). Ceci « pour atténuer les déficits de consommation alimentaire et le recours à des stratégies de survie », qui témoignent d’un état de crise assez poussée (phase 3 de l’IPC) voire d’urgence (phase 4). Pour l’instant, si « l’aide alimentaire reste une source essentielle de nourriture dans de nombreuses régions du Soudan du Sud, […] le nombre de bénéficiaires atteints reste inférieur au niveau des besoins », note FEWS NET.

« Afin de maintenir les améliorations de la sécurité alimentaire à long terme et de mettre fin au risque de famine (phase 5 de l’IPC), il faut que l’accord de paix de septembre 2018 soit pleinement appliqué, que le conflit prenne fin pour toutes les parties et que l’aide soit renforcée », indique FEWS NET dans son communiqué.

Selon lui, les principaux facteurs de la « forte insécurité alimentaire » ne font aucun mystère : il s’agit des mauvaises conditions macroéconomiques du Soudan du Sud – qui a obtenu son indépendance du Soudan en 2011 -, elles-mêmes « facilitées » par le « conflit prolongé » que connait actuellement le plus jeune pays au monde. Son président, Salva Kiir, et le chef rebelle, Riek Machar, dont les différends ont plongé en 2013 l’Etat sud-soudanais dans une guerre civile (plus de 400 000 morts au compteur…), ont d’ailleurs échoué à former un gouvernement d’union pourtant prévu pour la date-butoir du 12 novembre.

« Ecarts croissants » 

Certains pays, comme les Etats-Unis, qui viennent d’infliger des sanctions financières à deux membres du gouvernement accusés de vouloir saper le processus de paix, travaillent pour accélérer la transition au Soudan du Sud. En attendant, l’insécurité alimentaire, malgré l’ « amélioration relative » de 2019, reste élevée. Et « marquée par des déficits dans la production céréalière », par exemple, ou bien par « un accès inférieur à la normale aux produits de l’élevage et des prix alimentaires élevés », indique le communiqué de FEWS NET. Qui ajoute : « Dans les zones les plus touchées par les inondations, les pertes supplémentaires de récoltes et de bétail entraînent une augmentation des besoins et la gravité de l’insécurité alimentaire. »

Insécurité alimentaire au Soudan du Sud. Source : FEWS NET

En 2020, selon les perspectives de l’organisme américain, « la sécurité alimentaire devrait se détériorer de février à mai », car les sources comme les « aliments sauvages », le poisson et des produits de l’élevage diminuent drastiquement. La crise devrait ainsi se généraliser puisque « de nombreux ménages connaissent des écarts croissants de consommation alimentaire », et « une situation d’urgence (phase 4 de l’IPC) est prévue dans 16 comtés des Etats de Jonglei, du Haut-Nil, d’Unity, du Bahr el Ghazal septentrional et de l’Equatoria oriental ». Ce qui équivaut à plus de 5,5 millions de personnes confrontées à la crise. D’après FEWS NET, il est même probable que de plus en plus de Sud-Soudanais « subissent une catastrophe » (phase 5 de l’IPC) l’an prochain. Soit la famine.

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